Caroline TRUCCO MAJ 26/03/2024

       
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
       
 
 
 
 
 
       
 
 
 
 
 
 
 
 
 
         
 
 
 
 
         
         
         
         
 
 
 
 
 
 
         
         
         
         
   
 
     
         
         
         
     
 
         
         
         
         
 
 
 
 
 
 
         
         
         
         
   
 
   
         
         
         
         
   
 
 

FOUMBAN, CAMEROUN, 2017
Fiançailles des regards dans un tête à tête avec un masque de justice Bamoun.
La chair devient bois, des substituts d’hommes émergent en mille collines
Les artisans automates diffusent une rythmique de cliquetis d’outils
Ces masses comblent les volumes. Je suis les courbes
Fumées de mots clairs et lignes obscurcies. Les statues meurent-elles aussi ?


ESEKA, CAMEROUN, 2017
Simgang, Essingan
La forêt dépouillée de bois rouge
Troncs fagotés expédiés sur les routes
Les racines numérotées susurrent des chants
L’écorce entêtée
Dans le logis qui domine le port, les voitures rutilantes de prépondérance blanche
Résurgences de nos corruptions internes
Le mbimbé envahit les forêts


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

CALAIS, DEMANTELEMENT DE LA JUNGLE, 2016
Le cercle des réfugiés
Dans la sphère de coton
Les yeux, seuls, sont encore capables de pousser un cri.


LOME, TOGO, 2009
J’avale des contours
Bond dans les masses aériennes et humides de Lomé
Un homme m’attend avec une pancarte
Colonies des hauteurs, un incendie de brume
Décapitant la carte déroulée d’une mousse verte.
Rupture territoriale
Les plaques encore mobiles se font engloutir
Par l’électricité du voyage


GARE DE OULED ZIANE, CASABLANCA, MAROC, 2017
Derrière une grille, dans un enclos délimité,
terrain d’égarement et corps inclassables.


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

CASABLANCA, MAROC, 2017
Les bras métalliques d’un palmier docile sur le bord du cadre
La sonorisation préenregistrée du monde récite des décors
Avec le sous-titrage de nos résistances


TANGER, MAROC, 2017
Je m’endors salée dans le feuillage de tes bras
Amour liquide
Au loin la femme qui navigue un enfant mort au sein
Corps sans chair au squelette dansant dans un soupir de clarinette Klezmer
Flux sarcastique et baiser fraternel.


CASABLANCA, MAROC, 2017
Je lance ma révolte valide
La tête fracassée de bruit
La nuit dépouillée de ses plumes de volaille, sacrifices inavoués sur ma couche
Témoin du verbe qui guérit
Et de la robotique aliénante
Des djinns colonisant les corps
La résonnance de nos cris mentaux
Dans un paysage vide d’hommes
La parole y enfonce les portes


EN TRANSIT, BARCELONE, ESPAGNE, 2011
La mer comme un tissu graphique.
Des terrains striés aux formes de steaks hachés grillés.
Le réacteur spiralé, hypnotiseur d’ailleurs
Réacteur à collerette interne de champignons noirs.
Derrière la cage vitrée, des avions aux têtes de phoques polies
Des individus en transit vacillent dans de longs couloirs étroits.


MOULEY BOUCHTA, MAROC, 2017
Dans la lueur matinale des montagnes superposées
Un horizon courbe vacille
J’épouse le lieu avec retard
Nos corps enveloppés d’une roche chaude ouverte
Devenue réceptacle
Nous triomphons sur la réussite d’un homme
Dont les mains façonnent une terre consolante
Les cheveux crépus d’une colline de sable argileuse
Le décor dissipe mes grillages de peur
Ici la nuit règne avec plus de force
Ravissement du cosmos qui absorbe les manques
Avec le son aérien et enveloppant des oliviers
Ondulations d’un appel familier


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

AKWA, DOUALA, CAMEROUN, 2017
Ils me renvoient leurs propres peurs et cette phrase frénétique et obsédante :
Comment rendre aux autres ce qui ne nous appartient pas ?
Cette phrase géante qui barre le ciel : Comment rendre aux autres ce qui ne nous appartient pas ?


ESEKA, CAMEROUN, 2017
Des crabes noirs sur lit de sang
L’animal balbutie, la conscience ouverte
Murmures essaimés dans le feuillage des forêts
Sortie du vert intense.


AKWA DOUALA, CAMEROUN 2017
La machinerie incessante Bolloré
Nous crache l’ampleur du mensonge
Silos et containers dans l’amplitude de la nuit
Je regarde l’espace fertile et hors de portée
Le mur de la censure dresse le drapeau noir de l’irréversibilité


NEW BELL, DOUALA, CAMEROUN, 2017
A Douala, la déroute du Chergui* annonce des sépultures apatrides
Aux funérailles on pleure et on évoque l’appel aimanté d’une tentative

*Au maroc, le Chergui est un vent chaud du sud-est provenant du Sahara.


ESEKA, CAMEROUN, 2017
La parole s’enterre,
le son comme les crachats de la pluie, Eseka
Un bar inébranlable arbore sur des planches de bois un triomphant « dansez jusqu’au sommet du monde »
Un peu plus loin un autre lieu lui répond : « jésus sauveur de l’humanité. »


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

CEUTA, ESPAGNE, DETROIT DE GIBRALTAR, 2017
Espace situé entre deux mondes
J’emprunte la voie oblique


BOUKHALEF, TANGER, MAROC, 2017
Lambeaux déchiquetés sous nos yeux autres
Bourrelets d’une chambre à air pour projeter sa fuite
Le son plastifié et mécanique d’un zodiac que l’on plie et replie
Dans une rigueur maraboutique
La délivrance du talisman caoutchouc


MESNANA, TANGER, MAROC, 2017
Un gouffre sous nos pieds globalisés
L’horizon est une lame fine qui tranche le paysage en deux
Dans un souffle d’assujetissement au monde.


BOUKHALEF, TANGER, MAROC, 2017
Présence fantomatique des lieux, je marche dans les pas de rescapés.
J’ai vu Diogène de Sinope le corps circulaire, arrondi dans une jarre habitat.
Dans l’absente cité, grouillante de bruits sourds, il cherchait compulsivement un homme.


MESNANA, TANGER, MAROC, 2017
Dans l’amplitude de plastiques colorés
Boîte de réglisse « Azzi * » sous ma chaussure.
Le goût embarrassant d’une colonialité expansive

*Nègre en arabe dialectale marocain


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

GARE DE VINTIMILLE, ITALIE, 2015
Paralysée
J’intègre le paysage et me greffe à l’errance collective.
Me frotter aux regards de survivance
Perdition sur perdition
Je ne peux sortir mon matériel de curiosité
Je ne peux le brandir
J’ai honte de vouloir capturer des captifs


MENTON, FRANCE, 2015
Vers le large ciel et mer soudainement sans limites
Les frontières fluides
Combien m’étranglent les cordes de l’horizon
Réveil dans des puits de silence


VINTIMILLE, ITALIE, DEMENTELEMENT CAMP ST LUDOVIC, 2016
Les rochers aux lettres usées laissent en suspens
le sens de ces vies empilées
Avec une résonnance de peau de métal.


PARIS, FRANCE, 2015
L’oiseau suit l’avion, il dénonce le simulacre
Pelleteuse à dresser les nuages
Le chant métallique des animaux pervertis
Sons mécaniques et corps machines
Le Boeing pénètre un ciel excisé et côtoie un cercle de mouettes affamées
Les cicatrices du ciel ravivent mes propres plaies sans nom
Verres cassés dans la tête sur le bruissement d’un tapis roulant
L’écœurement rythmique des cliquetis de l’horloge
La grande guillotine du train
Les ouvriers creusent nos tombes
Préliminaires aux marteaux piqueurs
L’horizon délavé, se javellise.


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

CEUTA, POSTE-FRONTIERE MAROC / ESPAGNE, 2017
Les révoltes arrivaient sur le sommet des montagnes
Les barbelés écorchant les regards
Nos deux visages confondus
Dans une œuvre clandestine commune


LOME, AEROPORT GNASSINGBE, TOGO, 2011
Le grand élancé aux globes gonflés d’abandon
Contre la vitre protocolaire de l’aéroport
Zigzag de dunes pour dépister ma fuite
Cicatrices sur le dos des dunes
Dans un grand bac à sable, de sables balafrés.
Retrouvailles comme un trident dans la poitrine


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

CALAIS, LE HAVRE, FRANCE, 2016
Un homme qui raye des continents dans sa tête, qui engloutit les espaces.
D’autres qui butent aux frontières.
J’entends battre ton sang nomade
Et les hauts murs polis par vos silences bâtis par des par des épaisseurs fixes
Des horizons murés, barricadés de hauts murs en béton
Mon regard plonge dans la mer


PARIS, FRANCE, 2015
La route discontinue sur le visage d’Em’kal Eyongakpa
Essai de gravure lino sur sa peau
Entaille de mes propres territoires mentaux
L’image agitée dans mes paupières closes
D’un rai de train flottant
Cicatrice mal cicatrisée libérant la pensée du milieu


PARIS, FRANCE, 2016
Mon regard devient celui d’une hyène qui tend son clitoris
L’horizon muré d’un phallogocentrisme latent
La phrase géante qui barre le ciel
Aux appétits de dictature
L’horizon muré et le battement de mon triangle
La phrase géante qui barre le ciel
Aux appétits de dictature
Le cri est amazone
La voie liberticide a été démantelée
Mon regard devient celui d’une hyène qui tend son clitoris


MENTON, FRANCE, 2014
Vue de champs de coton par la fenêtre
Un horizon lunaire entre deux colonnes en béton abreuvant le jus de la mer
Colonnes de mots sonores
Bouillie d’algues et mer de pétrole
Je pense au lac gelé et à demain qui recommence
Nous irons nous égosiller face au noir et à la bave agitée de la mer
Et nos cris seront des cordes jetées au large


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

NICE, FRANCE, 2013
Ce matin, je me sens déchargée de mes voyages
Un poids inerte n’ayant jamais bougé
Le continent sur la taie d’oreiller auréolée
Ma bouche et ses eaux produisent des territoires nouveaux


LOMPOUL, SENEGAL, 2012
Les fruits ramenés de voyage ont pourri prématurément dans un sac plastique noir « Sénégal ». La mangue molle crache une pâte brune et odorante. La gelée du dégout émerge. Ma gorge enfiévrée d’un arrière goût de lait caillé


NICE, FRANCE, 2012
Perforation du ciel, comme un éclat extraterrestre dans la nuit noire. Le correcteur automatique m’invente une langue inconnue.


PARIS, FRANCE, 2016
Je goberai la lune comme une hostie divine,
Couleur pâte d’arachide
Le cri final des chants Yiddish et d’Oum Kalthoum
Lamentations multiples


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.

SAINT LOUIS, SENEGAL, 2012
Madame Toubab reconnaît les appellations spéficiques pour le blanc
Elle sait quand on la compare à la blancheur de la salamandre
Quand on la nomme oreilles rouges
Elle rougit doublement car elle sait
Madame Toubab est dévorée par la gêne,
Elle est une pièce rajoutée, elle dénote, elle crée la dissonance.


NICE, FRANCE, 2011
Colons contre colon
En même temps que j’examinais et prenais conscience de l’ampleur du passé colonial français, mon propre colon contaminé par une bactérie expansive doubla de volume.
Tous deux gonflés de suprématie


COTONOU, BENIN, 2012
Albinoserie de ma peau
Bouillonnement ineffable
Plante moi des bouts de bois piquants
Initie moi à Alafia
Arrache moi mes faussetés authentiques
Je suis le processus d’acculturation volontaire
Je suis la culpabilité blanche, vorace, puissante, dévoreuse, aveuglante
Je suis un cas d’étude idéal pour les héritiers du psychiatre Frantz Fanon


NICE, FRANCE, 2012
Perforation du ciel, comme un éclat extraterrestre dans la nuit noire.
Le correcteur automatique m’invente une langue inconnue.
La peau de lait me quitte. Mer noire et ciel de coton.
Je compte mes performances en apnée
Aux battements de ma machine.


Extraits de carnets de route 2009/2017
Utilisés pour la perfomance In-betweenness : avec le sous- titrage de nos résistances, Cité internationale de arts, colloque Moving Frontiers, 2018
Utilisés lors de Lectures croisées performatives, dans le cadre de l’exposition Un chapelet d’îles noires accroché à l’horizon, Appartement, Paris. Participants invités : Fabiana Souza et Julien Creuzet.