Geoffroy MATHIEU 

Un mince vernis de réalité 2000 – 2008
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Un mince vernis de réalité 2000 – 2008
38 photographies couleurs
Impression jet d’encre

"Un mince vernis de réalité immédiate recouvre la matière, naturelle ou fabriquée, et quiconque désire demeurer dans le présent, avec le présent, sur le présent, doit prendre garde de n'en pas briser la tension superficielle"
Vladimir Nabokov, la transparence des choses

« Bon, je vais faire un tour dans le quartier »
Jirô Taniguchi, L’homme qui marche

Ces images sont comme des extractions de réel puisées dans une réalité contemplée. Elles sont le résultat d’une pratique quotidienne à la recherche, non de moments mais de dessins, formes ou situations qui composent le monde. Pour peu que le regard soit disponible et vigilant, les images apparaissent et n’ont plus qu’à êtres empruntées (et non capturées).
Ces parcelles de monde sont autant de témoignages d’un certain regard posé à certains endroits aussi divers soient-ils. Tout est à photographier. Au milieu d’un champs, au bord de la mer, au coin d'une rue... Pour peu qu’apparaisse sur le lieu de la vision une charge poétique suffisante pour torturer le documentaire qui la compose. Pour peu qu’il y soit possible de capter ce « mince vernis de réalité » qui recouvre toute chose. Pour peu qu’arrivent ces petits accidents qui bousculent l’ordre des choses.
Il ne s’agit alors plus de narration, ni de reportage, ni de démonstration, ni d’autobiographie mais de parcelles individuelles poétiques de monde rendues disponibles et réveillées par le processus photographique.
Cela compose des séries avec autant de sujets qu’il y a de photos sans autres liants entre elles que la façon dont elles ont été prises. Et qui ne témoigne plus que d’une seule chose, un rapport au monde.

Extrait du texte de Michel Poivert :
L’inconscient prosaïque ou le goût des cadavres exquis
Préface du coffret, Un mince vernis de réalité, Editions Filigranes

(...) Geoffroy Mathieu, ayant au préalable mis une distance par le recours à un paysage de mer. Rapidement le couple qu’il forme avec un port et la figure d’un homme solitaire regarde du côté de la terre. Et c’est presque toujours dans l’alternance des états comme des éléments que l’artiste développe son univers poétique. Se répondent ainsi le module de terrassement à la géométrie parfaite et les degrés d’un emmarchement en perspective, l’obscurité redoublée d’une frondaison nocturne et le battement lumineux de deux bras de lampadaire, la chaleur d’une plage sauvegardée par son enrochement et l’éclat têtu de la posture d’un tout-petit. Une perspective marine dans le trapèze de tiges métalliques et la profondeur dissimulée d’un trou que recouvre une grille enfeuillée ; une paroi maçonnée que surplombe une frondaison, et une falaise en plongée sur laquelle un homme sombre. L’artiste parvient dans ses fraternités imagées à produire des images orphelines. L’enfance flotte et dérive, la femme est retournée et presque atone, l’architecture carcérale, les ouvertures dérisoires, l’issue amazonienne. Comment mieux dire le peu de sens que l’on accorde au langage ?

Le corps, la nature, la nature du corps, l’objet et le langage. Ce cadavre exquis s’est animé de la description du monde à partir d’images projetées de soi.

 
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