Éloge aux écrivains publics est un projet non-réalisé, conçu avec Martine Derain dans le cadre d’une invitation du Centre Culturel Français de Damas en 1999.
En 1994, j’ai rencontré Ben, écrivain public à Noailles. C’est alors que j’ai constaté la présence de nombreux écrivains publics au centre-ville de Marseille : Noailles, Canebière, rue d’Aix, Hangar J4 – lieu de départs pour l’Algérie - sur le port autonome de Marseille… Un petit inventaire en construction… Par la suite, plusieurs images ont été réalisées, notamment entre 1999 et 2000 par : Youcef Soltani (Nigéria), Isabelle Massu (Cambodge), Martine Derain (Jérusalem), Naïma et Saïd Soltani (Sétif), moi (Gaza).
L’écrivain public apparaît comme une trace de l’inégalité face aux savoirs et notamment face à la lecture et à l’écriture. Héritier du scribe antique ou du barde gaulois, il est un personnage qui pourrait sembler quelque peu anachronique dans des sociétés où tout tend à s’informatiser. Au contact de Ben, en le sentant être avec les personnes qui franchissaient sa porte, une litanie d’adjectifs ont alors émergé pour tenter de comprendre son rapport à l’Autre : humaniste, rassurant, discret, accueillant, confident, réconfortant, simple, sécurisant, à l’écoute, sincère, tolérant, sensible (…), avec toujours le soin d’un rapport non-avilissant à l’Autre. Les rencontres avec d’autres écrivains publics ont montré que c’est à cet endroit-là, dans cet entre-deux, ce rapport à l’Autre, que se jouent des rapports de domination. Franchir le seuil de l’écrivain public n’implique-t-il pas d’emblée un sentiment d’infériorité ?
À Damas, nous avions proposé un éloge qui devait prendre la forme d’une inscription dans le sol, près du gouvernorat, là où le pouvoir se montre, précisément à la jonction du sol de marbre utilisé au niveau de l’entrée réservée à une élite et du sol commun en pavés autobloquants.
Éloge aux écrivains publics, les mots : |