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| Didier Petit /1 L'oeuvre :
Je ne suis pas sûr que l'histoire d'une création se construise par rapport à un sujet. Il s'agirait peut-être d'abord de construire le lieu ou l'objet, comme pour prouver que l'oeuvre est aussi ce qui a été là. L'idée d'une peinture m'effraie quant à la fonction qu'elle va produire. Ce sera donc par la reproduction que l'oeuvre sera le lieu ou la parole
Quant à l'histoire de l'art occidentale, elle ne saurait être écrite sans que soit pris en compte la question du modèle. Modèle vivant, afin d'étude, modèle antique, idéalisé selon un canon, ou baroque, délié, comme en extase, modèle anatomique, écorché en cire, ou parfois modèle mort, en vue d'une dissection, l'art s'est chargé d'une recherche du corps permanente et absolue. De nombreux artistes contemporains continuent de travailler autour, fascinés par le rapport étroit du corps et de l'art quand il s'agit de représentation. C'est dans ce lien tenu, du corps, de sa monstration, de sa mémoire, réelle ou figurée, que je développe mon travail.
Le travail intitulé “Les murs de ma chambre”, commencé en 1989, est un vaste ensemble d'images et d'installations. . Les images, photographies et dessins au crayon ou à la mine de plomb, constituent un corpus répertorié des connaissances humaines, vues à travers l'imaginaire d'une chambre close. Subdivisé, pour l'instant en trois parties (Les murs de ma chambre, Stéréoscope, Etat Civil), ce travail est axé particulièrement, par projection mentale, sur une représentation autobiographique en négatif. Que ce soit dans un rapport au lieu (Les murs de ma chambre), un apprentissage du savoir (Stéréoscope), ou une tentative d'auto-formulation (Etat Civil), les oeuvres, pour arbitraires qu'elles soient dans leurs formes ou leurs techniques, subjectives dans leurs choix, permettent de glisser d'une idée à une autre, de l'observer sous plusieurs angles, de passer du dessin à l'installation, de la photographie à l'édition de cartes postales ou de livres. Entomologiste, ethnologue ou astronome, je m'applique, sujet après sujet, à la construction d'un dictionnaire subjectif, comme autant de périodes d'histoires, de voyages ou de lieux inhérents à ma vie. Qu'il s'agisse d'insectes, de plantes, de constellations ou de visages humains, le dessin fait appel à l'imagerie populaire du dictionnaire ou du dessin d'anatomie.
Didier Petit /2 Le corps en morceaux, le fragment : La représentation du corps passe par son analyse et l'étude du corps a besoin de la représentation. Le dessin, longtemps lié au modèle vivant a confronté l'artiste à la fragmentation du corps. Fragment modèle et référent, objet de comparaison, point de départ d'une reconstitution matérielle, le corps est un mécanisme qu'il faut savoir démonter et remonter pour en connaître la moindre articulation, le moindre détail, mais aussi le sens, le fait qui le tient debout, qui lui donne masse, présence et capacité à vivre. Depuis 2003, je travaille sur cette idée de fragmentation et de découverte ducorps humain. Les dessins, réalisés à même le mur. basculent entre l'image idéalisée, dont l'apparence rappelle le canon classique (Corps d'Apollon), mais malade (dermatose) et l'image réelle, moulage mortuaire du visage d'un bourgeois romain, (Masque d'Or) ou le visage devient substitut de la personne entière, qui, sans plus prêter d'attention à sa découpe fragmentaire, tend à s'imposer comme une sculpture classique. Ces dessins muraux s'associent parfois à de réelles anatomies médicales ou à des papiers découpés au scalpel, dentelles qui, fixées entre deux plaques de verre, révèlent des parties internes du corps (tissu sanguin, nerveux...), dentelles qui permises par les moyens actuels de connaissances anatomiques (IRM), transfigurent notre relation à l'imagerie du corps, et imposent toute l'énigme de ses formes abstraites.
Didier Petit / 3 Vraies ou fausses études anatomiques d'après ouvrages médicaux, où le corps s'affranchit de sa stature pour égarer le regard dans un développement quasi baroque (Grand sympathique) mais aussi représentations méticuleuses du corps malade, pesant, déformable et vieillissant, comme fixé par le dessin, dans un lien à l'antique, confondant la cicatrice avec l'usure d'un plâtre ou d'une sculpture de marbre brisée, descriptions scientifiques des différents organes et fonctionnements du corps, restitués par la photographie où l'analyse joue de l'articulation possible entre la fiction de la science, sa rigidité et la réalité mouvante de la structure humaine et de l'oeuvre d'art. Fixer les éléments du corps comme des insectes sur une planche d'entomologie, c'est aussi parfois en compléter le fragment, réitérer la copie , mais lui substituer la statue par le corps, y chercher encore le modèle d'une dégénérescence ou d'une faillibilité même du corps statufié, usé par le temps, rappeler le tout par la partie, provoquer l'imagination par le manque à combler, disséquer pour élargir les champs de représentation, évoquer enfin l'histoire de la figure humaine dans toute sa réalité ou son imaginaire. Passer du vivant à l'objet inanimé, transfigurer une réalité ou un constat médical, leur insuffler par le dessin la densité ou la fragilité d'un corps, chercher les relations entre un corps humain et la vision pérenne du corps modèle, statufié, explorer méthodiquement parfois jusqu'à l'abstraction, décortiquer la pose du modèle à la statue dans une confusion des genres, c'est par une variété de supports, mais aussi de formats que ce travail aborde la relation d'une image à une société, à sa mémoire au sein de sa production artistique.
Catherine Grout : Jeunes créateurs à suivre (extrait), in Eighty n°33, 1990 Le travail de Didier Petit entretient une lutte permanente entre ce que l'on pourrait appeler une origine spirituelle et sa mise en forme. C'est une des raisons pour laquelle il soumet ses idées et ses symboles à de longs travaux préparatoires.
Les dessins, les croquis très soignés sont nécessaires. Ils sont à la fois le lien avec les oeuvres passées, et ils sont les étapes d'une installation complexe, la première pierre posée d'une construction en devenir.
Ses oeuvres gardent en elles la tension des deux forces ; la volonté de révéler le spirituel et la difficulté de sa manifestation à travers des matériaux choisis, des images, des références. Les résultats aboutissent parfois à un mutisme des pièces, à un ensemble qui ne livre pas d'emblée son secret.
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| Didier Petit's work entertains a permanent struggle between what one might term a spiritual origin and the form it assumes. It is one of the reasons for which he submits his ideas and symbols to long preparatory works. The carefully executed drawings and sketches are necessary. They are both a link to past works and the stages of a complex installation, the first stone laid for a construction yet to come. His works possess the tension of two opposing forces; the will to reveal the spiritual and the difficulty to manifest it through the materials, images and references chosen. The results at times give rise to a certain mute quality in the works, to an ensemble that unveils its secret little by little. Catherine Grout : Jeunes créateurs à suivre (excerpt), in Eighty n°33, 1990
I am not sure that the history of a creation is constructed in relation to a subject. What matters is perhaps to first build the place, as if to prove that the work is also what has been there. The idea of a painting frightens me insofar as the function it will produce. It will thus be through the reproduction that the work acts as place or word. The work entitled Les murs de ma chambre, begun in 1989, proposes a series of images and a series of reconstitutions. The images can be photographs or pencil or graphite drawings, making up a broad repertoire of human knowledge as perceived through the fictitious details of a room. Entomologist, botanist or astronomer, I dedicate myself, subject after subject, to the constitution of a subjective dictionary, as so many periods in history, of journeys or places inherent to my life. Whether it be insects, plants, constellations or human faces, the drawing calls up the popular imagery of the dictionary or anatomical drawings. The reconstitutions present photographs or re-constructions of places destined to be preserved: a wall on a wall, the spot where an object once stood filled in by an art object, the chimney, wall paper, paneling, parquet protected by a pane of glass and a metal frame, as if to guarantee, through this mute trace, the passage between creation and destruction. Didier Petit, 1989-1998
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Techniques et matériaux
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dessin / drawing photographie / photography crayons et scalpels crépi / roughcast bois / wood | |
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Mots Index
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enfermement / confinement auto-formulation / self formulation encyclopédisme / encyclopedism pattes de mouche / spidery scrawls abécédaire / alphabet primer | |
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champs de références
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Le mur / The wall
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repères artistiques
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Tristram Shandy Xavier de Maistre L'image dans le tapis Goudéa de Lagash Jacques Fabien Gauthier d'Agoty Jacques Vaucanson Coronelli Robert-Houdin Nicéphore Niepce Étienne-Jules Marey Donald H. Menzel Henri Rouvière Jean-Pierre Brisset | |
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