STAUTH & QUEYREL 

Puisque dans la société du spectacle, l’œuvre n’est plus qu’une partie, un segment incrusté dans la mosaïque des objets et des signes, il convient en ce cas, d’appréhender comment l’art peut s’inscrire dans ce contexte et quelle place peut-il encore y occuper. Dans cet horizon, Queyrel et Stauth engagent une entreprise de réévaluation du champ de l’art à l’heure de sa redistribution.

1- Puzzle critique : si on ne peut plus alors traiter de l’œuvre d’art comme d’un objet isolé, comme d’une entité séparée et autonome, il s’agit de reconstruire d’autres modalités de présentation et de production, comme de légitimation du champ de l’art dans toute l’étendue de sa grammaire (auteur, œuvre, catalogue, exposition…). La production de Queyrel & Stauth s’organise alors comme un puzzle critique ou un patchwork paradoxal, dans lequel l’œuvre revient d’une exposition à l’autre, exposée, contextualisée différemment. Il n’y a plus d’œuvre, mais seulement des devenirs d’œuvres…
2- Pièces à conviction : chaque œuvre constitue le fragment, l’étape d’une production en marche, qui s’établit dans l’expansion dissonante de ses propres échos. L’œuvre devient son propre clin d’œil, une surprise en forme de souvenir, la pièce à conviction d’une entreprise de reconstruction de l’idée d’exposition. L’art est ce jeu qui expose ses règles de constitution, dans le théâtre d’un revenir incessant, où chaque pièce subvertit son origine.
3- L’œuvre-kit : il n’y a plus à produire d’objets, mais à construire des dispositifs de production, un système de fonctionnement, qui construit ses modalités de présentation autant qu’elle déconstruit les procédures de légitimation. Le catalogue (censé soutenir la production), devient chez eux une œuvre en kit, à reconstruire à posteriori dans le processus même de l’exposition. Jeu de rôle ou permutation économique ; les conditions de l’œuvre deviennent l’œuvre.
4- Véhicules et segments : la question de la production n’est plus que celle de sa présentation (celle du stand, des panoplies, et des emballages de l’art en tous genres). Dans cette mise à nu dans son maquillage même, l’œuvre n’est plus qu’un segment (à l’instar des tableaux-joyaux de “l’écrin”), ensembles hétérogènes autant que dans des véhicules inhabituels (un camion, une cabane…). Loin des déconstructions célibataires de la fin de l’art, Queyrel et Stauth agissent d’une façon jubilatoire et plurielle, comme si l’absence irrémédiable de l’origine en art à l’ère de la marchandise et de son échantillonnage conditionnait sa profusion paradoxale et infinie.

F. Perrin, Échantillons d’art, Queyrel et Stauth, dispositifs de présentation

 
Le camion (stand), 1993
Techniques mixtes, 300 x 800 x 150 cm
Vue de l’exposition Stand, Panoplie, Catalogue, galerie Roger Pailhas, Marseille, 1993
Photographie Fred/Pedram
 
Le mur (stand) 1993
Techniques mixtes, 350 x 680 x 60 cm
 
Premier plan : La cabane (stand) 1992
Techniques mixtes, 275 x 400 x 300 cm, collection Frac Paca

Arrière plan : Le mur (stand) 1993
Techniques mixtes, 350 x 680 x 60 cm
Vues de l’exposition Stand, Panoplie, Catalogue, galerie Roger Pailhas, Marseille, 1993
Photographies Fred/Pedram

 
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