Mehdi MOUTASHAR 

Vues de l'exposition Lastic, Galerie AL/MA, Montpellier
30 septembre / 10 novembre 2016
Crédit photos Jean-Luc Maby
 
 
Vue générale de l’exposition
 
 
Deux angles droits, 2016
Fil élastique,123 x 295 cm
 
 
Trois carrés dont un pivotant à 45°, 2015
Acrylique sur bois et fil élastique, 150 x 150 cm
Collection particulière
 
 
Un carré et trois angles droits, 2016
Bois peint et fil élastique, 59 x 90 cm
Collection particulière
 
 
Point à la ligne, 1988
Métal peint et fil élastique, 113 x 30 cm
 
 

Lastic

   
     
Apparu récemment dans la boîte à outils de l’artiste, tantôt associé au métal tantôt matériau unique de l’œuvre, l’usage du fil élastique tendu entre deux points s’est chargé sans crier gare de réactiver – au propre comme au figuré, et avec cette part de jeu devenue de plus en plus évidente ces dernières années – ce qui aimante depuis toujours le champ d’exploration de ses recherches : la question de l’orientation.

Un moyen, en fait, plutôt qu’un matériau, tant l’objet est dépourvu de vie au repos, quelque chose comme un vecteur (juste une idée au fond…), qui se serait de lui-même invité dans le travail d’un artiste déjà peu attaché aux séductions de la matière. Pour le coup, c’est malicieusement au hasard du plus simple des gestes électroniques – le pointeur d’une souris d’ordinateur tirant une ligne sur une esquisse d’architecture – que s’est nouée l’affaire.

La tension du fil, suspendue aux deux clous qui l’organise, dessine, mais plus encore désigne : moins une ligne qu’un courant, la vibration d’une énergie. La voir soudain surgir à la toute dernière seconde de l’accrochage a quelque chose de magique, dont la modestie des ingrédients augmente la surprise – quelques pointes fichées au mur, la pelote anodine d’un élastique roulé en boule… ; l’élastique progresse,
  lentement d’un point à l’autre, fine mesure d’un espace, puis d’un coup fend le vide dès que la main le lâche, segment moulé à l’exacte mesure de l’instant.

On perçoit bien, ensuite – dans le frémissement du tracé qui ne cesse de s’élancer, à cette ligne qui est là sans l’être, mais surtout toujours en train de se faire – ce qui relie naturellement ce nouveau processus aux périodes précédentes d’un travail qui ne cesse de se préoccuper de la continuité du mouvement. Le corps du clou aidant, c’est tout juste si le tendeur effleure la surface, et ce vide minuscule qui persiste entre le fil et le support agit comme un ressort supplémentaire, et la transparence qu’il libère conduit le mouvement au-delà de la forme. Une mécanique simple, un presque rien, que rien n’arrête.

Dès lors, dans la chorégraphie toujours renouvelée des angles et des plis qui orchestre l’ensemble de l’oeuvre, l’élastique s’inscrit du bout des doigts comme un être ou un fragment mathématique, avec cette légèreté, cette absence de poids qu’il partage avec la lettre et qui fascinent tant l’artiste dans la profondeur de l’écriture…
Lastic, comme un nouveau chapitre, en somme, d’une dédicace ininterrompue à l’arabesque.



M.M. Serres
9 septembre 2016

     
   
 
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