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| Texte de Michel Enrici Philippe Turc "La raison du sommeil"
On a dit (1) de l'atelier de Philippe Turc qu'il était un cabinet de curiosités, une immense caisse à jouer dans lesquels s'entremêlent ses propres productions et une cueillette d'objets qui n'appartient qu'à sa subjectivité. Ainsi cohabitent la maquette du Cuirassé Potemkine et le regard de Lauren Bacall, une armure médiévale et le bâton d'un marcheur, les papillons et les étoiles, le Kamasutra et le manuel du pèlerin. Mille et une connexions qui s'organisent comme des connivences entre les formes, les matériaux et les liens symboliques, expression d'une intimité qui n'a pas à se justifier autrement qu'en faisant oeuvre. Le syndrome de Peter Pan habite visiblement l'artiste, l' oeuvre et l'espace où l'un, l'une et l'autre pratiquent leurs noces. Ménage à trois, comédie sérieuse qui se referme comme une clôture dans ce que l'on appelle la vie d'artiste.
Toute la production de Philippe Turc donne ainsi de la matérialité à un rêve prolongé que peu s'autorise. Dans l'amusant fatras de son atelier, c'est l'oeuvre qui semble avoir la fonction de produire un ordre, symbolique et sensible. Et cette oeuvre est justement produite de main d'homme tel un pop-up qui nécessite au final, pour son érection fragile, le papier et la colle. Colle, papier, renfort, résine donnent forme à un univers qui visiblement veut concurrencer le premier monde, celui que chacun rencontre partagé entre émerveillement et déception.
A la Galerie Meyer à Marseille nous avons pratiqué une étrange expérience. M'est revenu le titre du roman de Mishima "Le marin rejeté par la mer": On connaît la magie de l'instant qui sur la plage nous fait découvrir les restes des choses et des objets quand le lessivage cosmique transforme le fortuit en énigme et le rien en potentiel magique. Le ressac ne dépose ni dessin, ni sculpture, au plus des à-plats de matériaux dont le meilleur principe de résistance avant le néant est la capacité à flotter. La pièce centrale de l'accrochage "La Sieste", que l'oeil attrape au niveau du sol avant de monter les quelques marches qui séparent la Galerie Mayer de la rue, est de l'ordre de cet à-plat qui rassemble feuilles et fleurs, dans la position d'un homme -un sous-préfet aux champs?- profondément installé dans un repos sidéral, les mains repliées sous la tête, elle même couverte d'un chapeau et lui même, de fleurs. Le gisant est vivant, n'en doutons pas, mais au coeur d'un sommeil éperdu pratiqué en soi comme le but d'une existence. Tant de latence, d'immobilité pourtant ne font pas corps. Le vent, le tourbillon de l'eau, le geste artiste d'un balayeur divin, auraient pu produire cette forme dont la définition irait plus vers l'anamorphose que vers la représentation. L'ensemble des pièces ainsi est soutenu par la force de ce sommeil et intervient comme une cosmogonie issue de la puissance du rêve. Saturne et consorts, lévitent dans l'immatérialité de l'accrochage dont les murs eux aussi sont vidés de toute représentation, mais occupés par des oeuvres qui sont autant de projections, véritables morceaux de rêve et de désir dont la grande force est de participer au principe atonique du sommeil. Et si la raison du sommeil n'engendrait pas les monstres comme l'a définitivement exprimé Goya? Et si cette exposition était une phrase consommant le titre des oeuvres? Si la sieste du randonneur, tout bivouac bu, faisait apparaître l'aimable proximité de la lune, de Jupiter et de Saturne, La Meije serait-elle plus proche de nous?
La Sieste refusait toute matérialité sculpturale: sculpture, elle était composée comme un leurre pour faire croire à l'absence de la sculpture. La Meije est sans doute l'autre tentation de l'exposition. L'érection tente à nouveau l'artiste. Sommet et glacier sont évoqués dans l'esthétique d'une maquette vériste, d'un décor de film d'animation. Etrange érection de la sculpture quand dans sa présentation elle s'émancipe de la gravité survolant le socle improbable d'un nuage. Lévitation donc d'un paysage ourlé dans les trois couleurs de l'innocence, le blanc, le vert, le bleu, héroïque ascension du paysage même qui tient pourtant à séduire et manifester la moue de ses neiges: Embrassons donc le paysage.
Nils Olgerson, Peter Pan, Gulliver et Philippe Turc sont dans le même bateau, celui de la poétique des rêves. Il s'agit pour eux de prolonger le miracle de la marche des enfants funambules, enfants des somnambules. Comment être mieux, plus sincèrement et plus adroitement artiste?
1) Vincent Enosc, in "Avec les maîtres" catalogue du Musée Cantini, Marseille, 2009
Thierry Ollat, dossier de presse Ateliers d'artistes de la Ville de Marseille, 1995 Son oeuvre se fond avec l'histoire du Sud, avec ses mots et les noms qui le racontent, celui d'un bateau ou d'un cinéma, avec ses mythologies quotidiennes de la mer. Elle met en arabesque et recueille dans leurs courbes ce que chacun de ces mots évoque dans la mémoire collective marseillaise. Le Napoléon, le star quel beau titre de péplums ! Narrative et cinématographique, l'oeuvre de Philippe Turc est une fantastique invitation au voyage. Un périple à la Jules Verne, qui aurait pour origine le casque d'un guerrier grec endormi sur le fond de la mer. Avec l'idée que son monde et que son voyage possède le monde, Philippe Turc est comme une comète aux pieds de sable. Il y a dans les spirales de sa trajectoire le scintillement des étoiles de mer.
Entre la peinture à laquelle elle se réfère volontiers et la sculpture dont elle emprunte parfois les formes, la poésie des oeuvres de Philippe Turc nous amène dans les territoires de l'imaginaire. Chacune d'elles raconte une histoire vécue, comme un jeu avec les objets du quotidien ou lieux de la mémoire. Serge Graziani, 1997
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| His works fuses with the history of the south, its daily mythologies of the sea and the words and names that tell it, like that of a ship or a movie theater. It weaves arabesques whose curves harbor what each of these words suggests in Marseille's collective memory. Le Napoléon, L'Etoile...what great titles for epics ! Narrative and cinematographic, Phillipe Turc's work is a fantastic invitation to journey. A Jules Verne- style odyssey, spawned in the helmet of a Greek warrior asleep on the ocean floor. Convinced that his world is the world and that his journey encompasses it, Philippe Turc is like a comet sprung fom the sand. Starfish sparkle in the spiral of its trajectory .
Thierry Ollat, press release for the Ateliers d'artistes de la Ville de Marseille, 1995
Readily referring to painting and at times borrowing its forms from sculpture, the poetry of Philippe turc's works takes us on a journey into the lands of the imagination. Each work tells a lived tale, like a game using everyday items or places laden with memory.
Serge Graziani, 1997
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Techniques et matériaux
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peinture utilisant différentes techniques sur différents supports : résine résine à inclusion plomb sable terre cuite acrylique huile laque...
painting using various techniques on various surfaces : resin inclusion resine lead sand fired clay acrylic oil laquer... | |
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Mots Index
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histoire et mythologie / history and mythology strate / stratum temps / time mot / word | |
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champs de références
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Homère
Louis-Ferdinand Céline
Sergio Leone
Blaise Cendras
Jules Verne
Diogène, les Cyniques
Emir Kusturica
Bashung
Italo Calvino
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repères artistiques
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