Maciek STEPINSKI 

THE STRAIGHT STORY
La N113 de Maciek Stepinski n’existe sur aucune carte routière et touristique. La série photographique N113 est une représentation d’un réel en chantier. Maciek construit lentement sa traversée, point après point, insérant parcelle après parcelle depuis plusieurs années. La route fonctionne comme un socle, un horizon, le rail d’un long travelling indéfini. La N113 porte une narration visuelle, une topographie imaginaire. La N113 est un entre-deux aux frontières du document photo et de la fiction. Un lieu de rencontre entre la mémoire et le rêve.
Entre la terre et le ciel, il y a des machines de chantier, gros jouets abandonnés par un étrange enfant indélicat qui prennent la neige en poussière.Les photos les représentent soit en vue frontale, de plain pied, sculptures sur leur paysage socle, soit en petits insectes habitant le panorama. Ces mécaniques immobiles renvoient infailliblement à cette autre mécanique, l’appareil-photo avec lequel Maciek construit sa propre route.

Maciek retouche les images mais il n’est pas question de seul repentir photographique. Il y a quelque chose de la post-production, de la mise en scène. Il soigne les éclairages, les décors, les costumes. Il arme son appareil sur le terrain et ensuite désarme les détails sur un ordinateur. Les travailleurs de la route, les échos anonymes du photographe dans l’image, ont des petits rôles de figurants. Ils semblent appartenir à une tribu sauvage-fluo qui vit là où l’image a été prise. Ils grattent la terre pour ses racines et jettent des lignes de pêche sur la route pour se nourrir.Il y a aussi quelque chose de l’épure (suppression de sigles, de plaques minéralogiques, d’évidences...), celle qui marque la différence entre l’observation et le regard, entre le document et le souvenir, entre le trop perçu et l’émotion. Celle qui indique la voie. Celle qui dépayse.

Le titre de la série, N113, un nom qui n’en est pas un, signale une idée de standardisation, de typologie.Il suggère l’existence de la N112, la N111, toute une trame jusqu’à la N1 originelle. L’infrastructure de la N113 de Maciek se déploie sans fin jusqu’à l’abstraction, ce qui prouve, alors qu’on l’imagine en photographe funambule, qu’il n’est pas prisonnier d’une ligne. Les images proviennent de la véritable N113, de Lorraine, d’Autriche et d’autres lieux à venir susceptibles de croiser la route de la N113 de Maciek.
Chaque endroit où des extraits de cette série photographique sont exposés montre une N113 différente. Un « road-movie » de temps d’arrêt s’offre au spectateur, un voyage dans l’immobilité où il combine son propre mouvement pour bâtir les séquences. La seule fois où les distances comptent. Il est invité à vagabonder au bord de la route, avancer, reculer, ralentir, s’arrêter, avec le sentiment que là il faut parvenir n’a ni désignation ni localisation, c’est une parabole contemplative. Si on sait replier l’espace avec simplicité et lenteur, le regard suffit comme véhicule pour vivre une traversée fragile et déroutante.
Luc Jeand’heur, galerie des Bains douches de la Plaine, Marseille

N-113 2002
Photographie couleur, tirage lamba sur dibond, 50 x 50 cm
Collection du Centre d’Art Contemporain, CSW - Châteaux Ujazdowski,
Varsovie, Pologne (copie 1/5)
Collection privée, Berlin, Allemagne (copie 2/5)

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 100 x 100 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 100 x 100 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 100 x 100 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 80 x 80 cm

N-113 2004
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 50 x 33 cm

N-113 2004
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 50 x 35 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 50 x 68 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 100 x 80 cm

N-113 2002
Photographie couleur
Tirage lamba sur dibond, 100 x 100 cm

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