Laurent SEPTIER 

Autoportraits quotidiens SX-70 1981-2010
Dimension de l'ensemble 1,40 x 62 mètres
Vues de l’exposition à Astérides, Marseille, 2002
Photographies Jean-Christophe Lett

Travail commencé le 1er janvier 1981, stoppé le 10 août 2010 avec l’arrêt de la fabrication des films standard par Polaroid : 10 813 images au total. Les options techniques et esthétiques proposées par Impossible Project (repreneur des procédés Polaroid par la suite) ne m’ont pas convaincu de redonner suite à ce travail.
 
 
 
Détails
 
 
Le vide, entre les passages
Depuis le premier janvier 1981, chaque matin, Laurent Septier se photographie, nu le plus souvent, devant un miroir. Ce travail de photographe, obsessionnel et précis, jouant quotidiennement avec lui-même dans la répétition du monde serait une exploration sérielle de l'autoportrait moderne, urbain, rapide (l'autoportrait est systématiquement réalisé au Polaroid SX-70) si le reste de son travail ne déséquilibrait cette démarche rigoureuse. Car la production photographique de Septier (outre le genre de l'autoportrait, c'est l'autobiographie, le voyage et, notamment, la Chine qui restent ses sujets prioritaires), ses images, donc, sont avant tout soulignées par leur assemblage. En effet, le plus souvent, ses photographies se suivent sans réelle cohérence : un paysage, un objet, une scène de la vie de tous les jours, le dos d'une femme, un train, les fondations d'une maison, un plat de cuisine... Ces images n'ont rien à voir les unes avec les autres. Est-ce cela qui leur donne une unité ? Comme dans les plans-séquences d'un film banal et instable ?
Le passage d'une image à l'autre est un lieu vide étrangement habité. Et Laurent Septier aime alors citer Victor Segalen : "Même en philosophie, le sujet, la signification des idées, ont une importance moindre que leur enchaînement, l'allure avec laquelle elles engrènent et se déroulent, bref que leur jeu". Le photographe aime parler de connexions et de porosités.
Bien sûr les choses sont perméables, le flux incessant : la photo passe d'une image à l'autre à travers le vide. Et le photographe conjugue les articulations de ces images : leurs raccords bizarres, les espaces tremblants où elles se connectent. Comme un signe avant-coureur de leur mise en réseau.
Tandis que Septier se photographie nu devant un miroir, le matin de préférence, il parle de la photo comme d'un acte différé en continuant à se photographier linéairement, chaque jour, au Polaroid. Dans sa cohérence minimale : son corps, le lieu minimum du photographe. Où les images ont alors quelque chose à voir entre elles. Même s'il sait très bien qu'il ne trouvera jamais l'espace pour réunir tous les Polaroids qu'il a pris depuis le premier janvier 1981. [Cette dernière phrase a été démentie depuis. LS]
Alexandre Castant, 1995
 
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