Olivier REBUFA - Documents d'artistes PACA

Multitude
Série de photographies couleurs, Dakar, Janvier 2000

La pauvreté est de tous les pays du monde. Elle est partout, surtout dans les pays du tiers monde ou en terme politiquement correct les pays en voie de développement, aussi présente que les grandes sociétés multinationales dont la plupart ont des C.A largement supérieurs aux P.N.B. de ces pays dont elles profitent d'une main d'oeuvre peu chère et dont les enfants font partie (Mattel en Asie il y à encore peu de temps). Cette population est en plus convoitée comme un futur client en puissance. Les deux tiers du monde, 70 % de la population mondiale vit en dessous du seuil de pauvreté.
Just do it.
Lors de mon repérage à Dakar en 98, j'ai été choqué de voir autant de gens en détresse habillés de tee-shirt publicitaires qui n'avaient plus ni forme, ni couleur. Les multinationales vêtissent la multitude des pauvres. Dans cette série ce sont des enfants de Dakar mais nous pourrions être dans bien d'autres pays d'Afrique, d'Amérique du sud, d'Asie ou d'Inde.
L'unification de la poussière, de la sueur et du sang sur ces vêtements de coton imprimé les transforment en "Véronique" de notre temps. Et puisque nous sommes en Afrique je pense aussi aux collectionneurs d'Art africain qui s'assurent que les masque de danse et de transe portent bien les marques de sueur pour en vérifier "l'authenticité".
J'ai eu la chance d'avoir, durant mon séjour, l'appui d'un jeune assistant photographe, Sada Tangara, de l'association Man Keneen-ki à Dakar. Sada a déjà une recherche photographique sur les enfants des rues, il les prend en train de dormir. En connaissant les enfants et les lieux qu'ils fréquentent, il m'a facilité la tache. Souvent il allait seul voir les enfants, leur faisait un portrait et ensuite échangeait leur "tricot suaire" contre un neuf (sans pub) et un peu d'argent. Il n'y a pas eu de choix de marques et la liste pourrait être sans fin. Cette série non exhaustive ne présente pas les marques de tabac, d'alcool, de banques, produits alimentaires, industriels, photographiques, etc.
J'ai mis en scène ces vêtements sur un portant en carton Afrique à partir de la découpe du profil de Sada, sur lequel j'ai épinglé les portraits d'enfants. Certains enfants n'ont pu être photographiés, très peu ont refusé, par contre aucune fillette n'a pu être contactée. Les petites filles des rues sont encore plus exposées que les garçons à toutes les violences des adultes et ne se laissent pas approcher, terrorisées.
Enjoy
Olivier REBUFA

A lire : « La guerre aux pauvres », texte Jean-Michel Bruyère, Issa Samb, photos Olivier Rebufa, éditions Sens & Tonka (environ 5€)