Hervé PARAPONARIS 

Éloge de la main


Hervé Paraponaris est photographe, dessinateur, sculpteur et peintre. Il entreprend ensemble ces modes d'expression, sans hiérarchie, s'appuyant sur l'un pour développer l'autre. Ses matériaux sont variés. La base de départ est là, dans l'imaginaire extrait des éléments. Il suffit d'élever ou d'éveiller le matériau à, tout à la fois, une image et une sensation. C'est son environnement qu'Hervé Paraponaris transcrit à une autre échelle, construisant des rapports du grand au petit, de la nature à son relevé, du regard à la mémoire, avec pour modèle, non pas une figure, mais l'intimité même de ces échanges.

Comment ce que l'on construit fragilise son propre corps jusqu'à la plus extrême mais aussi la plus cassante réceptivité. Le corps écoute tandis que la main répare. Hervé Paraponaris a besoin de ce rapport tactil. Il lit le monde en braille et de près. Il faut entrer dans le paysage. Le point de distance est à l'intérieur du corps.

Parcequ'il s'agit de main, il n'est pas question d'entendre une habileté ou un bien faire. Sinon qu'ici , elle gouverne entre les écueils : lisibilité trop appuyée, elle s'en garde, pas de démonstration, émotivité, oui, dans la leçon des choses, dans l'apprentissage d'un savoir personnel, d'une confrontation à la nature, autrement elle change de bord. C'est l'instrument de la rectification, des pansements qui laissent passer l'air. C'est aussi l'instigatrice des dégats au devant desquels elle s'affaire.

Hervé Paraponaris tient son ambition à l'écart d'un discours, pas d'une analyse. Celle-ci n'est pas traduisible en d'autres termes que des passages, des ponts, des renvois d'une oeuvre à l'autre. Il poursuit ainsi ce qui se nomme une présence, détachée d'un mode d'emploi. Les opérations qu'il utilise ne contiennent pas en elles leur propre finalité. Elle sont les instruments de conquête de son environnement, les modalités d'une appropriation nullement littérale. L'imaginaire s'en mêle. La connaissance du matériau est débordée par les images qu'il suscite. C'est un savoir démuni, mais qui a l'ambition d'embrasser à la fois le monde et le sentiment qu'il procure. Ce n'est pas remettre les compteurs à zéro. C'est passer outre les états d'âme fin de siècle, la litanie des constats, des tautologies, pour regarder du côté du matin.

Frédéric Valabrègue
1991



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