Enchanteur 2019
Détail recto
Format 26 x 34 x 6 cm
Béton, manuel d’enseignement d’Histoire de 4° coffré, sérigraphie encre noire mate
Acquisition Mucem 2019
Enchanteur 2019
Détail verso
Crédit photos Mucem / Marianne Kuhn
Enchanteur
Cartel
Exposition cycle Algérie-France, La voix des objets, Mucem, 2019
Vitrine cycle Algérie-France, La voix des objets articulant le modèle du PAVOIS
de Paul Landowski et Enchanteur, Mucem, 2019
ROMAN NATIONAL
Enfant,
Tu vois sur la couverture de ce livre les fleurs et les fruits de la France.
Dans ce livre tu apprendras l’histoire de la France,
Tu dois aimer la France,
Parce que la nature l’a faite belle,
Et parce que son histoire l’a faite grande.1
L’école républicaine retrouve l’une de ses premières tensions du XIXe siècle : comment fabriquer de l’homogénéité à partir de la pluralité culturelle ? La promotion d’une histoire émancipatrice ou comment réfléchir à une histoire qui agirait comme tremplin d’un rapport critique au monde d’abord, puis d’une prise de conscience par les élèves de leur place à occuper en tant qu’acteurs de ce même monde.
Une histoire plus inclusive et représentative de l’ensemble des élèves, plus articulée autour de son pendant économique et social, et qui interrogerait ses acteurs, la grande absente de l’écriture scolaire de l’histoire [restant] la dimension sociale, ou la place de l’ordinaire.2
Dans le cadre du cycle Algérie-France, la voix des objets organisé par le Mucem autour de la collection d’œuvres et d’objets issus de la collection du Musée de l’Histoire de la France et de l’Algérie de Montpellier, en dépôt au Mucem à Marseille 3, je suis invitée, avec une classe de 4° du collège Longchamp 4, à « réfléchir et concevoir une œuvre collective » 5, à partir d’un questionnement autour de la sélection retenue pour le prochain cycle intitulé « Algérie rêvée, Algérie vécue, des regards en miroir ». 6 Plusieurs professeures sont associées au projet. Dans un contexte où la mixité scolaire semble faire défaut dans plusieurs écoles du centre-ville marseillais, la classe de 4°4 présente le visage d’une France métissée. En effet l’Arménie, la France, l’Algérie, la Tunisie, le Portugal, le Cameroun, le Gabon… dessinent le hors-champ de ces multiples et riches univers individuels que je vais côtoyer. La question qui nous est posée :
« Être Franco-Algérien aujourd’hui : quelles visions de l’Algérie depuis la France ? 7
« Non pas une Algérie, mais des Algéries » 8
Un pluriel qui « inquiète » 9, un pluriel qui soulève la question d’une Histoire commune partagée et apaisée, des récits qui pourraient être comme les « images manquantes » du grand « Récit_Roman National » enseigné à l’école. À la thématique coloniale – abordée en fin d’année scolaire pour les classes de 4° - ne sont accordées que « quatre séances - évaluations comprises ». 10
Lors de la première rencontre avec les élèves, autour d’un « dispositif panoptique » 11 présentant très largement des images d’œuvres et d’objets issus de la collection, ont été soulevées diverses questions, je retiendrai les suivantes ; celle de l’identité («Je suis algérien, ma mère est née en France, mon père est né en France, mes grands-parents sont nés en Algérie… »), celle des zoos humains (« On les montre comme des animaux », « C’est du racisme »… ») et enfin un certain étonnement face à la présence de certains objets dans la collection, comme « l’écharpe de l’OM », une carte postale avec la mention « Tunisie »…
1- Ernest Lavisse, Manuel d’enseignement, 1951
2- Pourquoi il faut substituer au “roman national” l’enseignement d’une “histoire émancipatrice”, Amélie Quentel - 25/03/18. Sur l’enseignement de l’histoire, Laurence de Cock, Éditions Libertalia https://www.lesinrocks.com/livres/pourquoi-il-faut-substituer-au-roman-national-lenseignement-dune-histoire-emancipatrice-138802-25-03-2018/
3- Projet initié par la ville de Montpellier au début des années 2000 dans l’optique de consacrer un lieu dédié à l’histoire coloniale de la France et de l’Algérie, non sans soulever de nombreuses polémiques. Le projet est finalement abandonné en 2014.
4- Collège public situé dans le 1° arrondissement de Marseille.
5- Période de travail avec les collégiens allant du 8 novembre 2018 au 14 mars 2019.
6- Mars 2019, titre non définitif.
7- Compte-rendu de présentation en vue de la préparation du cycle Algérie-France, la voix des objets, Mucem, novembre 2018.
8-Giulia Fabiano, « Hériter 1962 - Harkis et immigrés Algériens à l’épreuve des appartenances nationales », Editions PU Paris Nanterre, septembre 2016
9- Bruno Le Dantec « Nos Algéries…, la belle affaire. Au lieu de rassurer ce pluriel inquiète. ». Extrait du texte « Monsieur des fruits amers » paru dans « Nos Algéries », Atelier de VISU, Marseille, avril 2004.
10- Site Eduscol, novembre 2018
11- Un « dispositif panoptique » qui se donne pour objet de renverser les regards, bouleverser la hiérarchie habituelle d’une salle de classe professeur / élèves en nivelant sur un même plan nos regards adultes / enfants. 32 chaises de collégiens disposées sur un cercle d’environ 6,50 m de diamètre orientées vers le centre. Disposition alternée filles / garçons
en - et 2019
Vidéo 22’
Production Mucem
Lire le texte : Réécrire l’héritage colonial à Marseille : les œuvres d’art contemporain comme interventions décoloniales
Marine Schütz
Lire l'article : Les musées européens, des espaces de circulationpour la pensée décoloniale ? Marine Schütz
Read text : Rewriting colonial heritage in Marseille: Contemporary artworks as decolonial interventions
Marine Schütz
Réécrire l’héritage colonial à Marseille :
les œuvres d’art contemporain comme interventions décoloniales
Ces dernières années, la question de la décolonisation du patrimoine s’est développée de manière particulièrement forte dans les villes qui étaient historiquement au cœur des enchevêtrements coloniaux. Dans le monde arabe, en Afrique et en Amérique latine, ce changement de paradigme s’est opéré par la redéfinition du patrimoine précolonial et colonial et la prise en compte de sa relation avec la modernité et l’identité nationale. Les sites du patrimoine, les événements culturels et les archives sont devenus des points de mobilisation et de protestation pour toute une série d’acteurs et d’actrices, notamment les artistes et les groupes minoritaires.
Marseille a été marquée, historiquement, par l’histoire coloniale. Elle fut la porte de l’Orient et de l’Afrique, ce qui en fit un carrefour important pour les cultures européennes, méditerranéennes et africaines, comme en attestent les nombreux noms de rues et monuments. Poussées par les discours répressifs sur l’héritage et la mémoire coloniale ancrés dans le paysage public, et par une image de la ville fondée sur la nostalgie de l’Algérie française, certaines pratiques artistiques se sont mises à négocier l’effacement paradoxal de cette histoire dans les politiques publiques. En utilisant des approches introspectives, Dalila Mahdjoub interroge le poids de la colonisation aujourd’hui, en abordant ses effets sur la mémoire.
Ce texte suggère que ses projets sont informés par une dynamique consistant à reconnaître la façon dont les expériences coloniales ont façonné les valeurs de la société et qu’ils constituent un point de mobilisation pour ouvrir un dialogue, de manière critique, avec cet héritage.
Bien qu’il existe plusieurs conceptualisations des intersections entre l’art et la décolonialité, le texte s’appuie sur les cadres de l’esthétique décoloniale telle qu’analysée par Walter Mignolo et Rolando Vásquez (Mignolo et Vásquez 2013). Sous ce label sont englobés les recherches académiques ainsi que les projets artistiques qui s’appuient sur l’affirmation selon laquelle « si la connaissance est colonisée, alors l’une des tâches à venir est de décoloniser la connaissance » (Quijano 1997). Mignolo s’est attelé à la tâche d’explorer la colonialité de la connaissance et à remettre en question l’épistémologie moderne par une enquête sur l’esthétique kantienne. Outre cette critique épistémique de la connaissance esthétique, l’esthétique décoloniale fait référence aux pratiques artistiques et curatoriales qui cherchent à renverser les idées hégémoniques. C’est plus spécifiquement dans ce cadre que l’article abordera les études de cas en portant une attention particulière à leurs processus et motivations, lorsque la création tente de défaire les effets du colonialisme en prenant en compte la façon dont le passé colonial est raconté à Marseille.
La Maison, le monde de Dalila Mahdjoub : l’art comme moyen de « trouver une place »
L’amnésie autour de l’héritage et de la mémoire coloniale en Europe a un impact profond sur les pratiques artistiques culturelles, y compris sur les luttes artistiques collectives et individuelles à leur sujet. Une analyse de la manière dont les artistes affrontent le passé colonial à Marseille peut être précédée par un aperçu sur les politiques de la mémoire coloniale et du contexte colonial de la ville. L’empire colonial français a existé pendant plus de quatre siècles, à partir du milieu du XVIe siècle. Cependant, c’est l’implantation française en Afrique - et plus précisément en Algérie - dans les années 1830 qui a réellement changé l’économie de Marseille et fait de la ville une grande capitale coloniale. Aucune ville n’était aussi liée aux colonies que ne l’était Marseille en France. La ville a accueilli deux des trois expositions coloniales (en 1906 et en 1922) mises en place par la France, et à ces occasions, la capitale coloniale a été remodelée par des monuments conçus pour des démonstrations grandioses du prestige et du pouvoir impériaux, revendiquant une signification impériale pour Marseille, et donnant une indication de la ferveur particulière des célébrations impérialistes lors de ce moment historique (Aldrich 2005, p. 92). Intégrés dans le paysage de la ville, des monuments comme l’escalier Saint-Charles, avec ses allégories des colonies, constituent des traces évidentes du passé colonial de la France et une intense mémoire coloniale (Aldrich 2005, p. 97). Les deux groupes sculptés monumentaux Les Colonies d’Asie et Les Colonies d’Afrique ont été commandés par la ville au sculpteur Louis Botinelly et ont été achevés en 1927 pour célébrer Marseille comme capitale impériale. Leur emplacement au sein de l’escalier menant à la gare Saint-Charles ainsi que les produits impériaux représentés, tels que les céréales et les fruits, évoquent le rôle central que Marseille a joué dans l’empire français et suggèrent comment la ville a acquis sa richesse grâce aux colonies. En revanche, il existe très peu de sites publics ou de plaques offrant aux ancienn.e.s colonisé.e.s et à leurs descendant.e.s une véritable commémoration civique.
Pourtant, depuis la fin de l’empire français dans les années 1960, la France a connu un afflux important d’immigrants originaires du Maghreb. Leurs descendant.e.s représentent aujourd’hui un quart de la population générale de Marseille. Au niveau national, les récents débats autour de la « politique publique nationale de la mémoire coloniale » (Dufoix 2012) ont été marqués par un profond clivage culturel qui a persisté pendant près de soixante ans depuis la décolonisation et qui a atteint son apogée au début du XXIe siècle. Les politiques mémorielles françaises coloniales sont fracturées. Par exemple, en 2005 a fait rage le débat public autour de la loi proposant de reconnaître la « dimension positive de la colonisation française en Algérie » (Dufoix 2012), qui a finalement été abandonnée en raison des protestations. Si l’ambivalence de l’État à l’égard de la colonisation explique la position « répressive » à l’égard de la mémoire coloniale, une deuxième ligne d’explication peut être liée à la concurrence entre les groupes patrimoniaux au niveau local. Par exemple, en 2014, près de la mairie de Marseille, dans les 1er et 2e arrondissements de la ville, les responsables municipaux ont apposé deux plaques commémorant Sétif et Guelma, deux villages algériens qui avaient connu une répression violente et meurtrière le 8 mai 1945 après avoir réprimé des manifestations, entraînant des émeutes. Sous la pression du groupe nostalgique de l’Algérie française Le collectif national : Non au 19 mars 1962, les plaques ont été immédiatement retirées.
Ces pratiques officielles de l’héritage colonial sont devenues des points de contestation parmi les citoyens et les artistes de Marseille. D’origine algérienne, et née à Montbéliard dans le nord-est de la France en 1969, Dalila Mahdjoub a passé sa jeunesse dans une famille nombreuse de huit enfants dans la banlieue de la ville d’Audincourt, habitée principalement par des familles d’ouvriers algériens, qui, comme son père, ont émigré d’Algérie dans les années 1950 pour travailler à l’usine automobile Peugeot. Dalila Mahdjoub a ensuite quitté Montbéliard pour suivre des études à l’école des Beaux-Arts de Lyon, puis s’est installée à Marseille, où elle vit aujourd’hui. Inscrit dans les coordonnées des pratiques de l’artiste-chercheur, qui est l’un des moyens esthétiques les plus remarquables, né dans la dernière décennie, pour négocier les interrelations entre les sciences humaines et les nouvelles formes d’engagement des artistes contemporains, le travail de Dalila Mahdjoub développe des « actes de mémoire » qui exposent le fossé entre ce qui a eu lieu dans le passé et la façon dont on s’en souvient dans le présent. En 2014, l’artiste a présenté l’installation La Maison, le monde à La Compagnie à Marseille. Le projet reposait sur la juxtaposition des traces archivistiques de son père et de celles des travailleurs mondiaux, aujourd’hui. Les spectateurs étaient invités à entrer dans l’espace d’exposition et à se confronter notamment aux médailles du travail appartenant au père de l’artiste, Saïd, cousues ensemble dans un langage textile que l’artiste avait utilisé dans sa précédente série, Mise à l’honneur. Le travail consistait à coudre ensemble des étiquettes de t-shirt portant les signes Made in Bangladesh, Made in Cambodia, etc. avec du fil rouge et à les peindre avec du soluchrom (un antiseptique que l’on applique sur la peau blessée) pour donner une « variation de rouge selon les matériaux de l’étiquette » (Mahdjoub 2016).
Médiant le sentiment de tristesse face à la difficile intégration sociale du père de l’artiste, l’œuvre peut être considérée comme une pratique informelle et individuelle de gestion de patrimoine colonial from below, centrée sur l’histoire des opprimés et visant à contrer les effets de la colonisation sur le rapport du présent au passé. L’intérêt de l’artiste pour une esthétique capable de préserver les micro-histoires coloniales et postcoloniales et pour la transmission de la mémoire et de l’histoire personnelles résonne avec l’observation d’Edouard Glissant selon laquelle « notre histoire (ou plus précisément nos histoires) fait naufrage, échouée dans l’histoire coloniale » (Glissant 1997, p. 14). Manifestant le besoin de déterrer les images refoulées du passé pour récupérer en quelque sorte des fragments de ce qui a été perdu pendant la colonisation, l’artiste émet également une critique sur la politique de mémoire institutionnelle française actuelle, qui aboutit à ce qu’elle appelle une « mémoire fragmentée ». Ce terme a émergé dans son œuvre récente Enchanteur (2019), qui aborde la manière dont l’histoire française lui a été enseignée lorsqu’elle était enfant. Basé sur des souvenirs personnels et familiaux de la guerre d’Algérie, le texte autobiographique accompagnant l’œuvre contenait un compte-rendu de ce qu’elle ressentait face au décalage profond entre les souvenirs traumatiques de mort et de violence de sa mère Khedidja et la version « enchanteresse » de l’histoire coloniale franco-algérienne racontée à l’école, où « rien de convenu ne pouvait expliquer, relayer, soutenir, contextualiser ou invalider les bribes d’un récit de [sa] mère » (Mahdjoub 2019).
Renforçant l’importance de l’héritage théorique de Frantz Fanon pour évoquer la douleur psychologique de vivre entre ces deux visions nationales irréconciliables du passé colonial, l’artiste emprunte son concept de « scissiparité » (Mahdjoub 2019). Dans Peaux noires, masques blancs, Fanon, qui s’est lui-même approprié la notion de « scissiparité » du discours disciplinaire de la biologie, décrit les effets des idéaux impériaux et républicains français - qu’il définit comme un et indivisible - sur les colonisés, qui font l’expérience de l’aliénation et de la double conscience. Il pose cette expérience comme la cause d’une violente désintégration du moi. En transférant ce terme, issu de la philosophie politique et de la psychiatrie de l’époque coloniale, à sa propre expérience contemporaine de sujet franco-algérien, l’artiste révèle que la mémoire coloniale s’écrit sur et dans le corps de celui ou celle qui se souvient et qu’il est possible d’hériter de tels événements traumatiques de façon transgénérationnelle. Comme le dit Dalila Mahdjoub (2019) à propos du poids du passé colonial dans le présent, sa réponse a été physique : « Il m’a fallu des années pour vomir toute cette saleté qu’on m’avait mise dans la tête. »
De cette façon, La Maison, le monde parle de la difficulté particulière du travail de la mémoire lorsqu’il se rapporte à l’histoire coloniale. Les surfaces textiles vibrantes que Dalila Mahdjoub crée, enchevêtrées de fils et recouvertes de peinture rouge, sont un geste artistique qui peut précisément rappeler ce processus de difficile stratification mentale.
Comme le suggère Amy Hubbell, la colonisation serait largement responsable de l’omission des expériences du peuple algérien et de celles de ses descendant.e.s. Une telle situation pourrait être interprétée comme une preuve de la mesure dans laquelle la colonialité affecte profondément la narration et la commémoration.
Contrairement à la plupart des artistes qui s’inspirent des pratiques des artistes-chercheurs, Dalila Mahdjoub utilise l’archive non pas comme un moyen de participer à la reconstruction historique de la colonisation, mais plutôt comme une ressource pour construire un lieu de mémoire pour les opprimés et les oubliés, pour celles et ceux qui n’ont pas de place. Elle juxtapose le travail de mémorisation de la colonisation et de ses séquelles à celui d’autres histoires soumises à des rapports de force. En ce sens, en refusant de limiter son discours aux questions franco-algériennes, elle échappe à la menace de l’essentialisme. Ses propos mettent en lumière le problème du manque ou de l’absence de sentiment de communauté comme une préoccupation grave, illustrée par sa question obsessionnelle « Que faire quand on n’a pas de place ? » et gagnent ainsi une portée plus universelle (Mahdjoub 2018). Dans le communiqué de presse de l’exposition, l’artiste établissait un lien entre les travailleurs et travailleuses d’aujourd’hui dans les usines du monde entier et les sujets coloniaux et postcoloniaux maghrébins ; leurs destins, suggère-t-elle, se croisent dans leur statut commun de personnes opprimées. Cette déclaration implique son rôle d’artiste, qu’elle décrit comme suit : « Je leur ai trouvé une place. Il s’agit de leur trouver un maison » (Mahdjoub 2014). Comme elle le propose ici, sa tâche ne consiste pas seulement à trouver métaphoriquement un foyer aux personnes opprimées au travers de son travail, mais aussi à s’engager avec force dans le débat sur la mémoire en inscrivant des histoires oubliées dans des lieux - un processus qu’elle conceptualise comme « leur trouver une maison » (Mahdjoub 2014). Commentant son processus de commémoration, elle explique qu’elle a trouvé « le bon endroit » pour la mémoire de son père : « la maison, le monde » (Mahdjoub 2014). Le type d’abri qu’elle a produit pour cela – « délimité par des rideaux faits d’étiquettes... de codes-barres, de serrures, de rideaux de serpillières, de rideaux-rideaux, de linceuls de rideaux, de serviettes de rideaux » (Mahdjoub 2014), et reproduisant ainsi l’atelier qu’elle a chez elle, dans la cuisine familiale - révèle la grande importance de la maison dans son travail, en tant que structure qui accueille les traces. Le titre de La Maison, le monde, dérivé d’un film de Satyajit Ray de 1984 (inspiré d’un roman de Rabindranath Tagore), et la forme « d’installation-atelier » renforcent la centralité de la maison/du foyer dans ce projet et l’intérêt de longue date de l’artiste pour ce sujet.
En effet, avant que la maison ne devienne une métaphore de la construction de la mémoire, elle est apparue comme un sujet concret dans la recherche conceptuelle de Dalila Mahdjoub. L’un de ses premiers projets à Marseille, D’un seuil à l’autre, créé avec Martine Derain en 2007, consistait à documenter la question du logement des travailleurs coloniaux arrivés d’Algérie à Marseille. Cette œuvre était située à l’entrée physique d’une résidence où vivent aujourd’hui d’anciens travailleurs coloniaux algériens âgés, dans le quartier de Belsunce, marqué par le « témoignage historique du lien de dépendance tissé par la colonisation entre ce peuple et la France » (Péraldi 2006, p. 37). Tout en commémorant un site majeur de l’immigration algérienne, cette installation a également déclenché des préoccupations plus conceptuelles autour de la signification du « chez soi » et de son rapport à la « domesticité ». Avec son titre, qui provient d’un proverbe kabyle signifiant « Au seuil ou à la porte où l’on accueille les visiteurs, tout est sens dessus dessous » (Mahdjoub 2007), l’artiste a attiré l’attention sur la nécessité de retrouver les modes de perception et de connaissance que la colonisation française a réprimés. La signification du titre est également essentielle : la maison, telle que décrite dans ce proverbe, est lue comme un site d’imprévisibilité plutôt que d’enfermement, ce qui déplace profondément les lignes de la maison et de l’appartenance. Ce déplacement évoque l’analyse de Marsha Meskimmon de la domesticité, qui est marquée, comme elle le suggère, par une tendance à assimiler « la maison et la nation (domestique par opposition à étrangère) à la sécurité » (Meskimmon 2006, p. 14).
Suivant les notes de travail de l’artiste sur La Maison, le monde, le sol de l’installation « ont été réalisé à partir de cartons [...] collectés auprès des commerçants du quartier de Belsunce », ramenant les traces du monde à la maison, et offrant également un lieu de travail où « le dedans et le dehors communiquent » (Mahdjoub 2014). Il semble donc que le proverbe soit physiquement réinterprété par le display même de l’œuvre car l’interaction entre le local (évoqué par son atelier) et le global (matérialisé par les étiquettes de t-shirts provenant du monde entier), perturbe le clivage entre le domestique et ses « autres ». De cette manière, l’œuvre semble mettre en œuvre un sentiment d’enchevêtrement. Ainsi, le travail de Dalila Mahdjoub ne se limite pas à contester la colonialité. Ouverte à une option décoloniale qui loue les sources des pratiques précoloniales, son « monument à la mémoire du père » (Mahdjoub 2014) met en commémoration un passé colonial dont elle se souvient en canalisant un sens de l’hospitalité dont elle a hérité dans le cadre de son savoir ancestral.
Références
– Aldrich, R. 2005. Vestiges of Colonial Empire in France: Monuments, Museums and Colonial Memories. Basingstoke : Palgrave MacMillan.
– Dufoix S. 2012. La Dispersion : Une histoire des usages du mot diaspora. Paris: Éditions Amsterdam.
– Eldridge, C. 2013. Returning to the “return”: Pied-noir memories of 1962. Revue européenne des migrations internationales. 29 (3) : 121–140.
– Gastaut, Y. 1993. La flambée raciste de 1973 en France. Revue européenne des migrations internationales. 9 (2) : 61–75.
– Glissant, E. 1997. Le Discours antillais. Paris, Gallimard.
– Hubbell, Amy. 2018. Made in Algeria: Mapping layers of colonial memory into contemporary visual art. French Cultural Studies, 29 (1): 8–18.
– Mahdjoub, D. 2014. Aurélien David, Dalila Mahdjoub: La maison, le monde. Marseille expos. Disponible ici: http://www.marseilleexpos.com/blog/2014/06/05/dalila-mahdjoub-aurelien-david-la-maison-le-monde-une-saison-dateliers-de-pratiques-artistiques-2/
– Mahdjoub, D. 2016. Dossier Mise à l’honneur. FMAC Marseille.
– Mahdjoub, D. 2019. Entretien [transcription]. 18 octobre 2019. Marseille, France.
– Mahdjoub, D. 2018. Entretien [transcription]. 17 octobre 2018. Marseille, France.
– Meskimmon, M. 2011. Contemporary Art and the Cosmopolitan Imagination. Londres : Routledge.
– Mignolo, W. 2008. Delinking, The rhetoric of modernity, the logic of coloniality and the grammar of decolonality. Cultural Studies, 21 (2) : 449-514.
– Peraldi, M. and Samson, M. 2006. Gouverner Marseille : Enquête Sur Les Mondes Politiques Marseillais. Paris : La Découverte.
– Quijano, A. 1997. Colonialidad del poder, cultura y conocimiento en América Latina. Anuario Mariateguiano, (9) : 201-246.
– Rahmani, Z. and Sarazin, J.-Y. 2016. Made in Algeria: Généalogie d’un territoire. Marseille: MuCEM.
– Schütz, M. 2018. Decolonial aesthetics. European Colonial Heritage Modalities in Entangled Cities. Disponible ici : http://keywordsechoes.com/
Rewriting colonial heritage in Marseille:
Contemporary artworks as decolonial interventions
In recent years, the issue of decolonizing heritage has emerged particularly strongly in cities that were historically at the heart of colonial entanglements. In the Arab world and in Africa and Latin America, this paradigmatic shift has operated through the redefinition of precolonial and colonial heritage and its relationship to modernity and national identity. Heritage sites, cultural events, and archives in Marseille have become points of mobilization and protest for a range of actors, including artists, minority groups, descendants of enslaved persons, and social movements.
Marseille was historically marked by colonial history. It was the gateway to the East and to Africa, making it an important crossroads for European, Mediterranean, and African cultures, as attested to by the many street names and monuments that bear witness to this past. Prompted by the repressive discourses on colonial heritage and memory embedded in the public landscape, and by a city image based on nostalgia for French Algeria, artistic practices continually negotiate the demise of public politics. Using ephemeral and introspective approaches, Dalila Mahdjoub questions the weight of colonization today, addressing its effects on memory.
The article will suggest that the different projects are informed by a dynamic consisting in acknowledging how the colonial experiences have shaped the values of society and mapping art as a point of mobilization to engage in critical ways with this enduring heritage. While there are several conceptualizations of the intersections between art and decoloniality, the article will draw on decolonial aesthetics as analyzed by Walter Mignolo and Rolando Vásquez (Mignolo and Vásquez 2013). Under this label is encompassed the academic research as well as artistic projects that draw on the statement according to which “if knowledge is colonized, then one of the tasks ahead is to de-colonize knowledge” (Quijano 1997). Mignolo has addressed the task of exploring the coloniality of knowledge and challenging Modern epistemology with an enquiry on Kantian aesthetics. Besides this epistemic critique of aesthetic knowledge, decolonial aesthetics refers to the artistic and curatorial practices that seek to change the hegemonic ideas. It is more specifically within this frame that the article will address the case studies by bearing a special attention to their processes and motivations when attempting to undo colonialism’s effects on how the colonial past is narrated in Marseille.
Dalila Mahdjoub’s La Maison, le monde: Art as a means of finding a place
Amnesia around colonial heritage and memory in Europe deeply impacts cultural artistic practices, including collective and individual artistic struggles over them. Any analysis of the ways in which artists confront the colonial past in Marseille should be prefaced by an overview of colonial memory politics and of the city’s colonial background. The French colonial empire existed for more than four centuries, starting in the middle of the sixteenth century. It is, however, French settlement in Africa—and specifically in Algeria—in the 1830s that really changed Marseille’s economy and turned the city into a major colonial capital. No city was so connected to the colonies as Marseille in France was. The city hosted two of the three colonial exhibitions (in 1906 and in 1922) set up by France, and on these occasions the colonial capital was reshaped by monuments designed for grand displays of imperial prestige and power, claiming imperial significance for Marseille, and giving an indication of the particular fervor of imperialist celebrations at this historical moment (Aldrich 2005, p. 92). Embedded in the city’s landscape, monuments such as Saint-Charles Staircase, with its allegories of the colonies, form an obvious memento of France’s colonial past as well as a sustained colonial memory (Aldrich 2005, p. 97). The two monumental sculpted groups Les Colonies d’Asie and Les Colonies d’Afrique were ordered by the city to the sculptor Louis Botinelly and were completed in 1927 to celebrate Marseille as an imperial capital. Their location in the staircase leading to the Saint-Charles train station as well as the imperial products represented such as the grain and fruits evoke the central role that Marseille has played in the French empire as well as they suggest how the city gained its wealth on the back of the colonies. On the other hand, there exist very few public sites or plaques offering the former colonized and their descendants a true civic commemoration. This is in spite of the fact that, since the end of the French empire in the 1960s, France has witnessed a significant influx of immigrants from the Maghreb region. Their descendants today make up one fourth of the general population of Marseille. At the national level, recent debates around the “national public politics of colonial memory” (Dufoix 2012) have been marked by a deep cultural divide that has persisted for close to sixty years since decolonization and that reached its peak in the early twenty-first century. Colonial French memory politics are divided. For example, in 2005 emerged the public debate around a law proposing to recognize the “positive dimension of French colonization in Algeria” (Dufoix 2012), which was finally abandoned due to protests. While state ambivalence toward colonization explains the repressive stance on colonial memory, a second line of explanation may be located in the competition between heritage groups at the local level. For example, in 2014, near Marseille’s town hall in the 1st and 2nd districts of the city, officials affixed two plaques memorializing Sétif and Guelma, two Algerian villages that had known violent and deadly repression on 8 May 1945 after suppressed demonstrations, leading to riots. Under pressure from the French Algeria nostalgist group Le collectif national: Non au 19 mars 1962 [“The national collective: No to 19 March 1962”], the plaques were immediately removed.
Such practices of colonial heritage have become points of contestation among citizens and artists in Marseille. Of Algerian origin, and born in Montbéliard in the north of Lyon in 1967, Dalila Mahdjoub spent her youth in a large family of eight children in the suburbs of the city, inhabited mainly by the families of Algerian workers, who, like her father, migrated from Algeria in the 1950s to work in the Peugeot automobile factory. Mahdjoub then left Lyon for Marseille, where she lives today. Taking up the practice of artist–researcher, which has been one of the most remarkable aesthetic means in the past decade to contain the interrelationship between the humanities and new forms of engagement among contemporary artists, Mahdjoub programs acts of remembrance that expose the gulf between what happened in the past and how it gets remembered in the present. In 2014, the artist presented the installation La Maison, le monde [“The house, the world”] in Marseille’s artist-run space La Compagnie. The project was based on the juxtaposition of the archival traces of her father and those of today’s global workers. Viewers were invited to enter the exhibition space and inspect two workplace medals belonging to the artist’s father, Said, sewn together in a textile-based language that the artist had used in her previous series, Mise à l’honneur, consisting of sewing together t-shirt tags bearing the signs “Made in Bangladesh,” “Made in Cambodia,” and so on with red thread and painting them with soluchrom (an antiseptic that is applied to injured skin) to give a “variation of red according to the label materials” (Mahdjoub 2016).
Mediating the artist’s sadness about her father’s difficult integration, the work may be considered an informal and individual practice of heritage from below, centering on the history of the oppressed and aimed at countering the effects of colonization on the present’s relationship with the past. The artist’s concern in using aesthetics for the preservation of colonial and postcolonial microhistories and for the transmission of personal memory and history resonates with Edouard Glissant’s observation that “our history (or more precisely our histories) is shipwrecked, washed up in colonial history” (Glissant 1997, p. 14). Manifesting the need to dredge up repressed images from the past to somehow recuperate some fragments of that which was culturally lost during colonization, the artist also issues a critique of today’s French institutional memory politics, which result in what she calls a “fragmented memory.” This term emerged in her recent work Enchanteur (2019), which addresses the ways in which French history was taught to her when she was a child. Based on personal and familial memories of the Algerian war, this autobiographical text contained a record of how she felt as a result of the gap between her mother Khedidja’s traumatic souvenirs of death and violence and the “enchanting” version of Franco-Algerian colonial history recounted at school, where “nothing agreed could explain, relay, support, contextualize or invalidate snippets of a story by [her] mother” (Mahdjoub 2019).
Reinforcing the importance of Frantz Fanon’s theoretical legacy in discussing the psychological pain of living in between these two irreconcilable national visions of the colonial past, the artist borrows his concept of “scissiparity” (Mahdjoub 2019). In Black Skins, White Masks, Fanon, who himself appropriated the notion of “scissiparity” from the diciplinary discourse of biology, described the effects of French imperial and Republican ideals—which he defined as one and indivisible—on the colonized, who had the experience of alienation and of double consciousness. He posited this experience as the cause of a violent disintegration of the self. By transferring this term, originating in the political philosophy and psychiatry of the colonial era, to her own contemporary experience as a Franco-Algerian subject, the artist reveals that colonial memory is written on and in the body of the person who remembers and that it is possible to inherit such traumatic events between generations. As Mahdjoub (2019) says of the weight of the colonial past in the present, her response was physical: “It took me years to vomit all this dirt that had been put in my head.”
In this way, La Maison, le monde speaks to the special difficulty of memorial work when it pertains to colonial history. The vibrant textile surfaces Mahdjoub creates, enmeshed with threads and covered with red paint, are an artistic gesture that recalls the process of mental layering. As Amy Hubbell has emphasized, layering has entered into the vocabulary of Franco-Algerian artists, such as Zineb Sedira and Katia Kameli, precisely as a means to materialize their peculiar type of memory. Consequently, La Maison, le monde is less about probing a history that has been forgotten than it is about exposing the multiple layers of the past and how “one can reformulate what had been erased by colonization and what had been silenced by the subsequent ruptures of independence” (Hubbell 2018, p. 8). As suggested by Amy Hubbell’s quote, colonization would be largely responsible for the omission of the experiences of the Algerian people and that of their descendants. Such a situation could be interpreted as an evidence for the extent to which coloniality deeply affects narration and commemoration.
Contrary to most artists informed by artist–researcher practices, Mahdjoub uses the archive not as a way to take part in the historical reconstruction of colonization but rather as a way to build a location of memory for the oppressed and the forgotten, for those who have no place. Mahdjoub juxtaposes the memorializing work of colonization and its aftermath with that of other histories subjected to power relations. In that sense, as she refuses to limit her discourse to Franco-Algerian issues, she escapes the threat of essentialism. Her words highlight the problem of a lacking or absent sense of community as a grave concern, exemplified by her obsessive question “What do you do when you don’t have a place?” and bear a more universal scope (Mahdjoub 2018). In the press release for the exhibition, she established a link between today’s workers in factories around the world and Maghrebi colonial and postcolonial subjects; their fate, she suggests, intersect in their shared status as oppressed people. Implied in this statement is her role as an artist, which she describes as follows: “I have found them a place. It is a question of finding them a home” (Mahdjoub 2014). As she proposes here, her task does not only consist in metaphorically finding oppressed people a home through her work but also in forcefully engaging with the memory debate by inscribing forgotten histories in places—a process she conceptualizes as “finding them a home” (Mahdjoub 2014). Commenting on her memorial process, she explains that she has found “the right place” for her father’s memory: “the house, the world” (Mahdjoub 2014). The kind of shelter she produces—“delimited by curtains made from labels…barcodes, locks, mop curtains, curtain-drapes, curtain shroud, curtain-towel” (Mahdjoub 2014), and thus reproducing the permanent workshop that she has at home, in the family kitchen—reveals the great significance of the house in her work, as a structure that hosts the traces of leftovers. La Maison, le monde’s title, derived from a 1984 film by Satyajit Ray (inspired by a novel by Rabindranath Tagore), and the form of “installation-atelier” reinforce the centrality of the house/home in this project and the artist’s longstanding interest in this topic.
Indeed, before the house became a metaphor for building memory, it occurred as a concrete topic within Mahdjoub’s conceptual research. One of her first projects in Marseille, D’un seuil à l’autre [“From one threshold to another”], co-created with artist Martine Derain in 2007, involved documenting the issue of housing for colonial workers who arrived from Algeria in Marseille. This work was located at the physical entrance of a residence where elderly former colonial Algerian workers live today in the Belsunce district of Marseille, a district marked by the “historical testimony of the bond of dependence woven by the colonization between these people and France? (Péraldi 2006, p. 37). While memorializing one major site of Algerian immigration, this installation also triggered more conceptual concerns around what “home” means and how it relates to “domesticity.” With its title, which comes from a Kabyle proverb meaning “At the threshold or the door where people welcome the visitors, things are going upside down” (Mahdjoub 2007), the artist drew attention to the need to recover the modes of sensing and knowing that French colonization repressed. The title’s meaning is also critical: the dwelling, as portrayed in this proverb, is read as a site of unpredictability rather than enclosure, which deeply shifts the lines of home and belonging. This shift evokes Marsha Meskimmon’s analysis of domesticity, which is marked, as she suggests, by a tendency to equate “home and nation (‘domestic’ as opposed to ‘foreign’) with security” (Meskimmon 2006, p. 14).
Following the artist’s working notes on La Maison, le monde, the installation floor “was made from cardboard…collected from merchants in the Belsunce district,” bringing the world’s traces home, and also offering a workplace where “the inside and the outside communicate” (Mahdjoub 2014). It seems, then, that the proverb is physically reinterpreted by the display as the interaction between the local (evoked by her studio) and the global (materialized by the t-shirt tags coming from the whole world), disrupts the divide between the domestic and its “others”. In that way, the work seems to enact a sense of entanglements. Thus, Mahdjoub’s work does not limit to contesting the rise of coloniality. Open to a decolonial option that praises the sources of precolonial practices, her “monument to the father’s memory” (Mahdjoub 2014) brings into commemoration a colonial past that she recollects in channeling a sense of hospitality that she inherited as part of her ancestral knowledge.
Références
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– Dufoix S. 2012. La Dispersion : Une histoire des usages du mot diaspora. Paris: Éditions Amsterdam.
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– Gastaut, Y. 1993. La flambée raciste de 1973 en France. Revue européenne des migrations internationales. 9 (2) : 61–75.
– Glissant, E. 1997. Le Discours antillais. Paris, Gallimard.
– Hubbell, Amy. 2018. Made in Algeria: Mapping layers of colonial memory into contemporary visual art. French Cultural Studies, 29 (1): 8–18.
– Mahdjoub, D. 2014. Aurélien David, Dalila Mahdjoub: La maison, le monde. Marseille expos. Available: http://www.marseilleexpos.com/blog/2014/06/05/dalila-mahdjoub-aurelien-david-la-maison-le-monde-une-saison-dateliers-de-pratiques-artistiques-2/
– Mahdjoub, D. 2016. File Mise à l’honneur. FMAC Marseille.
– Mahdjoub, D. 2019. Personal interview [transcribed]. 18 October 2019. Marseille, France.
– Mahdjoub, D. 2018. Personal interview [transcribed]. 17 October 2018. Marseille, France.
– Meskimmon, M. 2011. Contemporary Art and the Cosmopolitan Imagination. London: Routledge.
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