Juliette LIAUTAUD 

Des précipités véridiques de rêves

Jeudi X mai 2015

je prends un covoiturage
on passe devant le rocher de Roquebrune
on me parle d’un ermite qui vit tout en haut entre les roches entre les cimes
entre les feuillages entre les feuillages épais entre les feuillages sur la crête

on part

on se trompe de chemin
on fonce droit
on grimpe
on grimpe entre les lianes
En chemin je photographierai les toiles d’araignée
les faisceaux de lumière qui leur ressemblent

plus loin
un pare-brise brisé

je ne filmerai pas l’ermite
peut-être la jardinière qu’il a taillée dans la grotte, la poussière sur les livres

Vendredi X juin 2011

je prends un train entre Usti et Prague
face à moi, cette vieille femme
cette vieille femme ne parle pas un mot d’anglais
on échange
dans une langue intermédiaire

je lui parle en miettes

vrba

vrba est un saule pleureur
vrba est un saule pleureur éclatant dans la nuit comme un terrain vague

déplacement

un an en République Tchèque

un soir sur une route enneigée en Ariège le souvenir du blanc épais dans les paumes
les joues froides
des écailles au bout des doigts
je ferai ce film
souvenir déplacé
on plonge des carpes dans une baignoire avant de les cuisiner
voix mécanique qui chante
la voix de Stanislava
Stanislava pour quelques mois à Marseille habite temporairement chez ma tante
écailles au bout des doigts
souvenir du blanc épais dans les paumes
une route enneigée
un soir

Lundi X février 2014

un herbier dans une photographie
à l’envers les mots s’enchaînent comme des hiéroglyphes
hlucho sourd, hluchavka ortie
plantes sourdes
pas bruissants neige salie
le libraire me demande quelques couronnes
dans la main la photo d’une montagne
ouverte brèche béante
plus tard je gravirai cette montagne et ramasserai des cailloux

Jeudi X mai 2013

je prends une route à un croisement

le ticket est plié dans ma poche
comme une fleur rare dans un virage que j’imprime dans les plis d’un papier froissé par la pluie

Mardi X février 2015

aucuba
dans l’agrandisseur
taches claires qui laissent passer la lumière
tirages à partir d’éléments naturels
vent soleil et pluie

choses derrière le soleil
croisements
croisements de chimie

Vendredi X octobre 2014

desert journal, light & other poems
ce dessin que je vois sur la couverture d’un livre de ruth weiss

ruth weiss a fait un film
invisible

je moule de l’argile dans les trous d’une pierre trouvée sur un chemin
météorite de pacotille

conversations avec elle
des soirs durant
musique

grain
dans un rayon
voix qui perce, la fenêtre, le soleil bas

livres entassés comme des pierres
schistes

secousse
capturer les silences et les secousses

Mardi X juin 2015

une mémoire au présent

Retour