Thierry LAGALLA 

La finalité au repos


La finalité au repos, voilà ainsi nommé le prochain rendez-vous que nous donne Thierry Lagalla à la galerie La Mauvaise Réputation. Saisissons cette occasion pour le suivre, à nouveau, dans cette œuvre néo-classique enjouée, facétieuse et sous-réaliste.
Comme vous l’avez certainement vu, entendu et remarqué, cette œuvre vient usiner, affleurer le réel pour en extraire le plus fin des copeaux. Rien à voir, à faire avec le minimalisme, si répandu, qui laisse supposer que par économie d’expression une pureté, un absolu est à portée d’œuvre. Non, ça Lagalla, ça le fait sourire. C’est ce même sourire qu’il doit arborer lorsqu’il crée à l’ombre des pâquerettes, comme il aime si bien le dire.
Laissons donc la finalité au repos et embarquons  ! Ici vous êtes à bord d’un véhicule à moteur pour voyage aller-aller à longue distance ex. : Bordeaux-Bordeaux. Vous serez accompagnés par l’Éternel Départ gymnaste club et l’olympique du Point de Non Retour. Tout au long de ce parcours vous croiserez l’artiste par le biais de l’autoportrait. Dans cette pratique, où le sujet se produit lui-même, où le propre, l’idiot, dans une création endogène, se figure, Lagalla régale. Dans un premier temps, à la Héraclite, c’est un lui enfant au milieu du fleuve, le voyage dans le temps, c’est difficile, puis le re-revoilà avec un autoportrait de la coin-coin producion. Dans un trompe l’œil, permanent, et plus si affinités, nommé fuck-similé par l’artiste, il ne cesse par mimétisme de se confondre avec son environnement. Ainsi la nature pittoresque des peintres du midi, monochromisée par l’artiste indigène, laisse voir dans mes ciels…Oh, pardon mes cieux, une joie que cette œuvre première, dans une superbe désinvolture, fait naître, constamment, du presque rien. L’original est une copie comme les autres, quel plaisir de le constater devant la facétieuse reproduction picturale d’une table en Formica imitation bois qui permettra d'introduire, à nouveau, au sein de l’œuvre, l’outil burlesque pâtissier, tarte à la crème (en prévision de) / Creampie (In Advance Of). Attention ça glisse !
Cette création à forte teneur en litote, dans une vie au trop, comme nous l’indique les hasards heureux de la balançoire, met à jour un monde réel créé par l’esprit qui envahit le monde des choses, une sorte de nectar claudiquant dont l’absorption transforme tout instant en un instant.
Ainsi crânement, depuis son atelier, l’artiste questionne tout ce qui l’entoure. Ici, il ne s’agit pas du coquet emploi de la mise en abîme, mais d’une interrogation sur la nature des choses et sa capacité à produire artistiquement du réel. Vue de l’atelier, porté par une ingénuité picturale, face à Mon faux sa-pin, cela nous paraît très clair. Par dessus tout cela, au milieu, entre, à l’intérieur, il y a la parole, pour ne pas dire le verbe, cet artiste et ces choses parlent, tchatchent plus exactement. Dans cet œuvre, les tranches de rôti, les lampes, les tables de ping-pong ... dialoguent, se représentent et se demandent si c’est parce qu’elles sont ainsi qu’elles sont.
Enfin, imaginons Lagalla dans la nature, posant son chevalet devant son sujet et peindre, avec une tendre application, une usine à gaz. Aller-aller, retirons-nous avec discrétion, laissons la finalité au repos et préparons-nous à bien voir ce que nous allons voir.


Jérôme Arieri, 2016
Exposition à la galerie La Mauvaise Réputation, Bordeaux

 
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