Suzanne HETZEL 

7 saisons en Camargue
hiver | printemps | vide-espace | été | intersaison | automne | mistral

Installations, palais de l’Archevêché, Arles, 2016
Dans le cadre des Résidences à Arles, service culturel de la Ville d’Arles.
Avec la participation du Centre Photographique de Marseille et de Jean Schneider, scénographe.
Exposition personnelle

 
Photographie couleur, 90 x 90 cm
 
Papier mural, dimension variable
 
 
Atelier de Paul Cox
Photographie couleur, 120 x 120 cm
 
Chambre des oiseaux
Installation, photographies, documents, objets
 
 
 
 
 

Habits de lumière
Installation : costume du Matador Juan Bautista ; boîte de 4 scarabées (plusotis resplendens), Costa-Rica ; ceinture de kimono brodée en fil d’or, Japon ; bijoux romains issus des fouilles du Rhône, Arles.

 
Trouvailles / plages de Camargue
Vitrine lumineuse, tessons et objets en verre
 
 
7 saisons en Camargue, Analogues, maison d'édition pour l'art contemporain.
Ce livre réunit des photographies et des observations personnelles, des histoires rapportées par des personnes rencontrées, des pensées ou même des conversations de marché. Il y est question de la gestion des eaux des salins, de la photographie, d'un boucher chevalin, de la Montagne des Cordes, de Ernst Jünger, de Toni Grand, de la tauromachie... il y est question de la Camargue.
Le graphisme est de Vincent Perrottet.
 

Pour donner forme aux impressions, aux images et aux récits que j’ai collectés en Camargue pendant deux ans, je me suis remémorée les Denkbilder (images de pensée) de Walter Benjamin. Ces textes écrits entre 1925 et 1935 nous amènent au cœur des éléments de sa pensée philosophique : le proche et le lointain, le geste qui prélève des fragments chargés d’histoire et d’expériences, le devoir qui nous incombe de les actualiser, sa fascination pour les collectionneurs et les collections, l’importance des gens sans nom dans l’écriture de l’histoire et sa conviction que « les choses anciennes nous regardent ». Il souligne notre responsabilité quant au maintien d'une relation entre le passé, notre présent et un futur.
Indéniablement, mon travail artistique porte l’héritage des images de pensée : il se construit à partir d’observations, de rencontres, de documents d’archives, de récits tout comme d’objets trouvés ou collectés, et de photographies, bien sûr !

Il s’est agi de trouver une forme d’attention à la Camargue : marcher, parler avec les personnes qui l’habitent et qui la connaissent, m’exposer au vent, observer les animaux, cuisiner son riz, glaner ses histoires. Mais aussi garder consciencieusement une place pour l'inconnu, pour l'impensable, pour les présences par lesquelles les lieux viennent à nous.
J’ai préféré envisager la Camargue comme un pays plutôt que comme un paysage. Ne pas succomber à l’étendue que l’image est venue assimiler à un décor. Cette manière de faire m’a permis d’explorer le delta dans ses épaisseurs, et de ne pas le voir à partir de ma personne posée comme centre face à l’horizon.
Par son absence de monumentalité, cet espace possède la puissance de mouvoir quelque chose en nous.

Songeant aux efforts phénoménaux des hommes pour comprendre un territoire et le rendre fécond et accessible, je prends conscience que mon désir d’aller en Camargue relève d’une forme d’attrait pour la part d’ombre de notre personne. Comme s’il y avait une expérience du bonheur particulière en des lieux où l’homme a conclu un pacte entre ses besoins et ses rêves et des éléments qu’il ne contrôlera jamais pleinement : l’ombre contenue dans les terres.
Et c’est peut-être ce que nous regardons quand nous sommes songeurs devant le paysage : loin de nous séparer de lui, nous nous ouvrons.

Suzanne Hetzel

 
 
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