Les couseuses, 2013
Tirages photographiques lambda sur Dibond, fil rouge
Dimensions variables
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Au vu de l’histoire de l’art, il semblerait que coudre était une activité domestique commune pour la femme occidentale dans les siècles passés. Avant, on réparait. Avant, c’était quand les vêtements et linges de maison n’étaient pas tous de facture standardisée et ne provenaient pas tous de pays où la valeur du travail salarié demeure moindre à celui de notre temps libre. Toutes ces dames, femmes et filles, immobiles, concentrées sur leurs ouvrages de précisions ont été représentées par des hommes qui les observaient, crayons et pinceaux à la main, à travers les styles, les époques, les avant-gardes, les petits maîtres et les grands noms. Il ne faut voir, dans le fait que Aïcha Hamu rassemble leurs reproductions numériques et les relie par un fil rouge en un espace, aucune forme de vengeance, mais un dessein. A.M.
Dystopia, 2010 / 2013
Dimensions variables
Bois, peinture, cheveux,
23 modules
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Dystopia, 2010 / 2013
Dimensions variables
Bois, peinture, cheveux,
23 modules
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Le cheveu crépu est organisé, sculpté, rassemblé, torsadé, lié, contrit, tiré, quadrillé comme un jardin à la française – stratégie de surface. Jamais il n’est défrisé, lissé, ammoniaqué, dénaturé ou transposé de manière ridicule tel le sacre d’un empereur suant en pleine Afrique Noire. Le chaos naturel a été dompté, adapté, structuré pour être accepté et compris par la logique humaine. Sa nature profonde n’a pas encore été trahie. L’effort se poursuit. Pour les jardins suspendus de cette métropole encore mouvante, les choses ont été faites avec application par de petites mains expertes : d’abord les détails ornementaux, l’agencement définitif des espaces attendra. Peu importe, vue du ciel, la maquette de la grande cité nègre a déjà fière allure. La construira-t-on jamais ? A.M.
L’antiforme du signe, 2013
Duvets en origami
Environ 60 x 200 x 100 cm
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Dans l’édition director’s cut du Blade Runner de Ridley Scott, le dernier plan du film diffère de celui qui clôt la version commercialisée en salle en 1982.
Le happy end champêtre et motorisé est remplacé par un gros plan sur une licorne en origami réalisée dans un papier argenté de paquet de cigarettes. Cela (d’après les trop nombreux fans qui semblent, dans leur vie, n’avoir qu’à digresser sur ce sujet) remettrait en cause tout le déroulé narratif du film : l’origami résonnant avec un rêve de licorne fait par le héros et suggérant, par là même, qu’il est lui-aussi un Réplicant.
Si les androïdes, chargés de souvenirs factices et implantés, rêvent de moutons électroniques, pourquoi les artistes du XXIe siècle, remplis d’histoires et d’images tautologiques jusqu’à la nausée, ne rêveraient-ils pas de cygnes en couettes dans le sommeil agité de la longue nuit ? A.M.
Sans titre, 2011
Cuirs rouges, polystyrène, tissu.
Dimensions variables
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Sans titre, 2011
Cuirs rouges, polystyrène, tissu.
Dimensions variables
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Depuis les cintres de la représentation fantasmée pendent en grappes plus ou moins compactes des monceaux de cuir rouge. La masse du décor se révèle plus précisément quand on y pénètre. Les détails sont ouvragés, là un pompon cavalier, ici un tressage savant. L’odeur de la bête est encore là, même si celle-ci est partie en oubliant sa pelisse au vestiaire du théâtre.
Il s’agit ici d’un pénétrable, comme on parlerait d’un humain ou d’un animal qui lui aussi le serait, à son corps consentant, bien sûr. On déambule déjà dans la matière alors qu’on avait seulement jaugé l’aspect extérieur, mais c’est trop tard une fois le Rubicon franchi, la politesse la plus élémentaire exige que l’on demeure à l’intérieur. De la chair il ne reste que la couleur, on le sait. On sait aussi qu’elle est devenue saucisse, steak ou rôti, puis excréments puis plus rien et qu’on est un peu complice de ce destin. Mais on se re-concentre et on profite du décor, encore un peu, encore un peu. A.M.
Sans titre (Récamier), 2009
Broderies au point de Poste sur banquette «Récamier»
68 x 96 x 44 cm
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Si quand on recule pour observer la peinture, on se cogne parfois sur une sculpture, on peut aussi parfois buter sur un meuble posé là pour soulager notre long effort de contemplation. Cela arrive parfois dans des musées où la beauté est offerte, débitée en tranches, au plus grand nombre – à chacun sa poignée de secondes devant un chef d’œuvre. Mais cela devient de plus en plus rare. Cela peut aussi se produire dans un salon bourgeois où l’on cause et où les tableaux ne sont souvent que des preuves d’appartenance de classe qui flattent l’ego et impressionnent les invités – un salon comme celui de Madame Récamier, un salon où, de l’indolence au grand sommeil, puis aux asticots, la marge de progression reste faible. A.M.
Hyphen, 2013
Empreintes d’images sur Transcryl entre deux plaques de verre encadrées
80 x 60 cm
Vues de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Des hommes et des femmes, sous l’effet de substances chimiques, de la foi, de la répétition ou d’un mélange des trois, subissent un traitement particulier et, de ce fait, deviennent traits d’union entre notre monde matériel et des espaces-temps plus dilatés où le champs des possibles, malaxés par quelques divinités, paraît plus vaste. Quand en haut quelqu’un parle, simples instruments, ils transmettent. Ailleurs et plus tard, leur image (de basse qualité comme on dirait de basse extraction) subit elle aussi un traitement spécifique. Nappée d’une substance aqueuse, baignée puis pelée, elle est ensuite encapsulée dans une gangue de verre, bloquée par un besoin d’exposition propre à l’occident – un besoin de comprendre là où il n’y aurait qu’à croire. A.M.
Anticipation, 2013
Bois, moquette, système sonore
30 x 150 x 300 cm
Vue de l'exposition Balibary, Pavillon de Vendôme, Aix-en-Provence, 2013
Photographies : J. Bernard
Dans un temps rituel, l’anticipation n’est pas de mise. Même si l’on sait précisément ce qu’il va se passer, on n’y pense pas. Même si on connaît précisément le déroulé des opérations, on feint la stupeur. C’est la magie du spectacle – être complice.
Ne pas attendre un moment précis mais jouir d’un flux et repousser le temps de l’analyse, de la froideur, du démontage sur la table de dissection théorique des tenants et aboutissants de l’oeuvre. Une fois la représentation close, les pièces à présent en vrac sur le plan de travail, on peut alors recomposer dans le temps et dans l’espace une manière de suspense à rebours où le spectateur – toujours complice, mais autrement – retrouvera ses repères chamboulés avec plus ou moins de bonheur selon les capacités de l’artiste.
Une autre représentation commence alors. A.M.