Clémentine CARSBERG 

Un nuancier de jaunes 2023
2,30 m x 80 m
31 nuances de peintures jaunes sur mur de béton
Commande du NEST Théâtre CDN Transfrontalier de Thionville-Grand Est (57)
 
Sur les deux murs de l’entrée du NEST, côté berges de la Moselle.
Le rythme physique de la clôture m’avait donné envie d’une déclinaison, un ensemble de différences.
En jouant avec l’objet « nuancier », je voulais revoir le jaune, les infinies possibilités de jaunes et questionner la perception.
Les nuances permettent une approche du point de vue et une réflexion sur nos moyens de l’exprimer, sur les formulations de nos sensations et les échanges que cela propose.
Des subtilités parfois difficilement discernables et exprimables qui en appellent à l'immatériel et au doute.
 
Des marquages 2018
Peinture de traçages au sol, environ 15 x 80 m
Oeuvre réalisée pour, avec, sur, le collège Mallarmé de Sens (89)
en collaboration avec Fabrice Manche, professeur d’arts plastiques et ses élèves,
dans le cadre d’une résidence organisée par Hors[ ]Cadre, association de promotion et de diffusion de l’art contemporain située à Auxerre avec le soutien de la Drac Bourgogne Franche-Comté
 

Lors du premier séjour d’« immersion » en novembre 2018, j’ai pu remarquer et noter quelques éléments sur lesquels j’ai basé mes pistes.

En voici quelques uns :
- le collège a des cours vastes et nombreuses (3), c’est à dire de l’espace au sol « libre ». Ces 3 cours protègent, partagent, isolent, elles ont des taux de fréquentations extrêmes (vides pendant les cours / pleines pendant les inter cours)
- la présence d’une œuvre d’art, celle de Godffried Honegger dans la cour 1 (entrée / parking)
- il y a beaucoup de marquages au sol (rangement par classes, chemin vélo, indications de sécurité) qui me renvoient aux jeux d’enfants (du type marelle) sans qu’ils en soient réellement
- il y a un espace Factotum, la façade de ce bâtiment semble entre deux, en apparence il semble différent des autres bâtiments qui sont eux valorisés, inscrits et représentés dans l’histoire du lieu. Cet ensemble aujourd’hui, ateliers, anciennement, écurie et porcelière de la « Basse Cour », faisait, semble-t-il, partie des premiers murs de l’enceinte (d’après un plan de la fin du 17e siècle)
- aussi le collège est composé de plusieurs ailes de bâtiments exploitées sur 2 étages avec fenêtres qui permettent de multiples points de vue sur les cours.

Et concernant le « territoire contexte » :
- lors de la visite de la ville par M. Brousse, il a attiré notre attention sur les «façades placards» de la rue de la République entre autre. Des immeubles fins d’une pièce, ce qui donne parfois une impression de façade vide, presque plate ou en deux dimensions...
- dans mes images récoltées lors des recherches et tâtonnements, il y a notamment des vues des inondations de janvier 1910 à Sens où je vois des bâtiments reflétant dans l’eau envahissante et je trouve le rapprochement avec les tracés au sol, intéressant, des reflets.
- la présence de la craie en souterrain depuis le crétacé supérieur, très exploitée dans cette région, notamment pour faire des peintures blanches.

« Le mur n’est pas seulement un porteur mais il fait partie de l’œuvre »
Gotffried Honegger

 

J’ai eu l’envie d’une projection au sol, des façades sud des bâtiments de la cour 3 et de leurs ouvertures ou traces. Il s’agirait de reporter les dimensions des bâtiments en perpendiculaire sur le sol avec de la peinture pour les marquages des zones de parking. Comme des silhouettes, une simplification des structures.
- Pour revoir ces bâtiments et leur structure
- Pour jouer au sol avec les marquages, l’idée de zones, délimitées, comme dans une marelle/plan
Il s’agit de la cour dédiée au 6e et au 5e, les plus jeunes du collège pour lesquels cela peut devenir ludique
- Des espaces dans/pour lesquels se raconter des histoires
- Pour l’usage du blanc (évoquant la craie, matériau majeur de la région sénonaise)
- Pour être dans le vocabulaire du classement, de la discipline, du rangement, de l’établissement (lignes au sol par classe)
- Pour se confronter aux dimensions des bâtiments
- Pour voir et/ou revoir leurs spécificités (une porte en hauteur dans le vide ?)

Dans l’historique de la cathédrale de Sens, sont rapportés des mots de Victor Hugo « dans la cathédrale de Sens, toute chose belle ou curieuse y a son pendant […] Tous les contrastes se mêlent dans l’admirable église et s’y résolvent en harmonie […] c’est de l’art compliqué d’histoire… ».
J’y vois une métaphore intéressante quant aux marquages au sol en miroir des bâtiments du collège, comme une prolongation, un complément.

Du point de vue des étages en face, apparaît très concrètement le côté « boite ouverte » du bâtiment reporté au sol, ce qui l’associe encore plus au volume de papier, au jeu de construction et cela me convainc du parallélisme à faire avec le montage pop up.

D’autant que lors de la visite du musée, j’ai été attirée dans la boutique par une carte postale pop-up persienne à tirette, qui permet d’avoir deux images en une, en tirant une petite languette. Cette découverte ludique m’a également mise sur la piste d’une carte pop up qui pourrait comme commémorer cette œuvre et permettre de la revoir ainsi que le parcours de sa construction d’un autre point de vue. Elle sera réalisée dans un deuxième temps.

 
Des archéo logis 2017
Canalisations, dalots, regards, ovoïde, divers tuyaux pour assainissement en plastique, béton, résine, parpaings, pavés, dalles, cailloux, galets, papiers collés et pâtes à sel peintes
Environ 11 x 3 x 1,80 m
Installation sur, avec, dans, pour, les chantiers place Verdun à Aix-en-Provence
Produit par la Ville d’Aix-en-Provence dans le cadre du Printemps de l’Art contemporain à Aix-en-Provence
 

C’est une proposition d’assemblage/sculpture inspirée de l’état des places les mois précédents la mise en place de l’œuvre éphémère, entre recherches et fouilles archéologiques et travaux de voiries.
Une forme de rangement des matériaux présents, envahis par un motif qui revient.
Mémoire de l’oeil et du temps qui passe, ce motif fait du lien (il rappelle celui des tissus muraux d’un salon du Pavillon de Vendôme), emmitouflé dans une interprétation du lieu, de cet espace.
« L’objet de l’archéologie, […] c’est la matière du passé qui remplit tout entière la masse du présent » Laurent Olivier « Des vestiges », mémoire présenté pour l’obtention de l’habilitation à diriger des recherches, Université Paris I, 2004
Les réseaux, les tunnels, les tours, les formes d’un passé dans ce présent, des traces et restes participent de cette accumulation aux allures de coupe, hors sol.
« Le détour par les traces est une manière de poser différemment la question du passé et du présent, de penser leur rapport d’imbrication et d’engendrement mutuel » Guillaume Lachenal «Le médecin qui voulu être roi» Seuil 2017

 

Au coeur de mes recherches actuelles, cette oeuvre participe de mes intérêts pour l’alentour et l’expérience que nous en faisons, pour le classement aussi, l’archivage, l’exploration du passé et du souvenir.
« Réalisé que le lieu du passé n’est pas le passé lui-même, mais bien le présent et lui seul » Laurent Olivier «Le sombre abîme du temps, Mémoire et archéologie», Paris seuil 2008
Je travaille dans une sphère où cohabitent les notions d’archéologie, de patrimoine, de vestige, de restes, de peu et de laissé-pour-compte, mais aussi d’habitat et d’intérieurs. Sur le terrain d’accueil, c’est un travail de construction qui s’engage, d’installation in situ.
« Le monument est en quelque sorte la mise en oeuvre de la mémoire d’un lieu » Anaël Marion dans Revue Marges n°14 Au delà du Land Art

 

Des Vestiges 2016
Briques terre cuite, papier peint
Installation in situ 15 m x 15 m
Parc Maison Blanche dans le cadre de la 8e édition du festival des Arts Éphémères

 
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