BERDAGUER & PÉJUS 

 
 
 
Berdaguer+Péjus, Éditions Analogue, 2012
 

 
 
Sélection de pages du catalogue
 

 
Jardin psychologique 2006-2012
Plexiglas, grillage, néons, bois, métal, 205 × 650 × 792 cm
Collection privée
Photographies Marc Domage
 

Psychoarchitectures 2006-2015
Frittage de poudre, dimensions variables
Collection FRAC des Pays de la Loire, Musée de Sérignan, FMAC, et collections privées
Photographies Blaise Adilon

Les Psychoarchitectures sont issues de dessins de maisons réalisés par des enfants pour des tests psychologiques. Ces dessins sont ensuite retranscrits en trois dimensions selon un procédé de frittage par laser, une technique de prototypage rapide agissant par superposition de tranches fines de matière.
Les «sculptures» de résine ainsi produites, d’un blanc immaculé, prennent des aspects anthropomorphiques (toits troués, formes molles, façades dont s’échappent les branches...) et forment autant de fantômes, de rêves ou de cauchemars d’architecture psychotique.

 
Dreamland 2007
Carton plume, matelas, écran plat, brouilleur d’ondes, dimensions variables
Collection musée des Abattoirs, Toulouse
Photographie Séverine Gamard

Dreamland se présente comme une architecture-paysage faite de plis et de recoins, évoquant la caverne ou la grotte primitive. La découpe franche de ses contours et leur opacité reprennent l’enveloppe des avions furtifs de l’armée américaine. Appelé ainsi à devenir «indétectable», Dreamland formule le projet d’une construction qui s’efface littéralement, à rebours d’un monde où l’architecture est un art saturé de visibilité, et dont l’ambition première est de se dresser, de se montrer, de faire face. Ce paysage de l’invisible dans lequel chacun peut venir se cacher s’entrevoit également comme le contrepoint total du Dreamland de Coney Island, le tout premier parc d’attractions inauguré en 1904 près de New-York, manifeste du divertissement de masse et de la théâtralisation de l’espace. Dreamland, c’est également le nom donné à la zone 51, dans le désert du Nevada. Une zone où l’armée américaine fabrique ses avions furtifs et qui n’apparaît sur aucune carte officielle.
 

Kilda (Lat. 58°, Long. 8°) 2008
Chaîne, cadenas, diaporama, dimensions variables
Système constructif: Patrick Vindimian
Collection Institut d’art contemporain, Villeurbanne
Photographies Blaise Adilon

Saint-Kilda est un archipel situé au large de la Grande-Bretagne où, pendant plus d’un millier d’années, les hommes ont vécu dans une autarcie quasi totale, tirant leur subsistance des dizaines de milliers d’oiseaux marins qui retournent chaque année nicher sur les îles rocheuses de l’archipel.
Kilda s’entrevoit comme une construction mentale qui, par sa nature et son processus de conception, ne s’ancre ni dans le sol ni dans les airs, oscillant entre un site et un non-site, entre le projet et la réalisation, entre l’envers et l’endroit, entre un monument pour les hommes et une architecture pour les oiseaux.
Architecture en miroir, Kilda (Lat. 58°, Long. 8°) est constitué, d’une part, d’une suspension en chaîne, squelette définissant les lignes et courbes d’une construction à l’envers, et, d’autre part, de son double construit, Kilda, ancré au sol. Cette architecture-sculpture met au même niveau le projet et sa réalisation, l’architecture et son double.
L’entrelacement de chaînes au centre de l’installation reprend les méthodes de l’architecte catalan Antonio Gaudí pour la Sagrada Família à Barcelone: afin de calculer la dimension des arcs et l’inflexion des voûtes de la basilique, ce dernier construisit de gigantesques maquettes de cordelettes suspendues et lestées en différents endroits de petits sacs de sable.

 
Utopia bianca 2009-2012
Forex PVC, carton plume, bâche plastique transparente, dimensions variables
Photographies Blaise Adilon

Utopia bianca se compose d’un ensemble de tables et d’étagères sur lesquelles s’empilent des maquettes. L’œuvre prolonge et réactive un projet d’Enzo Mari, Autoprogettazione, en 1974. Le designer italien proposait des plans et schémas de meubles (tables, chaises, lits et autres) à monter soi-même, à moindre coût et avec une grande liberté d’adaptation dans la forme comme dans les couleurs. Les maquettes reprennent le mobilier d’Enzo Mari dans une quantité qui correspond aux besoins de 400 familles, soit la population d’un phalanstère selon la définition de Charles Fourier. De manière objective et clinique, Utopia bianca présente ainsi une communauté potentielle, le projet fantôme d’une utopie encore à construire.
 

With Sarah 2009
Tubes PVC, flocage, aluminium, papier, 250 × 300 × 250 cm
À partir du projet de «maison sans fin», de Sarah Winchester, 1884
Photographie Mathieu Génon

Construction réticulaire générée par un système de connexions synaptiques, la forme de With Sarah évoque un énorme cerveau, comprenant en son centre un espace de sommeil. Constituées de roues et d’une mine de plomb, les extrémités en contact avec le sol esquissent un dessin lorsque la structure se déplace. Un principe qui rappelle les outils utilisés par les spirites pour faire dessiner les esprits, et qui fut à l’origine des plans de construction de la «maison sans fin» de Sarah Winchester. Cette veuve, convaincue que des esprits allaient la tuer si la construction de sa maison en Californie était finie, a poursuivi pendant trente-huit ans, de manière ininterrompue, 24 heures sur 24, la construction de sa maison. Architecture générant de l’architecture, ce Ouija à taille humaine trace les «lignes d’erre» de nos voyages somnambuliques.

 
Timezone 2010
Vidéo (60 min), éditée en 3 exemplaires
Collection IAC Villeurbanne, collection MAC Marseille

Timezone met en scène un homme marchant dans du sable gris. Filmée de haut, la spirale de matière se scinde au fur et à mesure de la déambulation en deux demi-cercles: l’un noir, l’autre blanc. L’œuvre renvoie explicitement à l’expérience imaginée par Robert Smithson pour expliquer le principe de l’entropie, autrement dit l’irréversibilité du temps dans la désagrégation d’un système: «Imaginez le bac à sable divisé en deux, avec du sable noir d’un côté et du sable blanc de l’autre. Prenons un enfant et faisons-le courir des centaines de fois dans le sens des aiguilles d’une montre à l’intérieur du bac jusqu’à ce que le sable se mélange et commence à devenir gris. Ensuite, faisons-le courir dans le sens inverse, le résultat ne sera cependant pas une restauration de la division d’origine, mais un degré de gris plus intense et un accroissement de l’entropie. Bien sûr, si l’on filmait une telle expérience on pourrait apporter la preuve de la réversibilité de l’éternité en montrant le film en sens inverse, mais alors tôt ou tard le film lui-même s’effriterait ou se perdrait*...» Tout en donnant corps à l’expérience, Timezone modifie le sens initial du mouvement. La marche «réparatrice» vers l’ordre originel est ici la restitution d’un déplacement qui s’est fait à reculons. À travers ce personnage devenu horloge humaine, le temps est retourné comme un gant pour illustrer un avancement (impossible) vers le commencement.

* Robert Smithson, «Une visite aux monuments de Passaic, New Jersey», trad. de l’anglais par Claude Gintz, Christophe Marchand-Kiss et John Tittendor, in Robert Smithson, Le Paysage entropique, 1960-1973, Marseille, Musée de Marseille-RMN, 1994, p. 182.

 
Jardin d’addiction (maquette) 2011
Verre soufflé, verre borosilicate, métal, bois, parfums, 100 × 150 × 150 cm
Réalisé avec l’aide des parfumeurs Les Christophs (Christophe Laudamiel et Christoph Hornetz) et du CIRVA, Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques
Photographie Blaise Adilon
 
Trou noir 2011
Plastiline, clés, chaîne, Ø 35 cm)
Collection privée
Photographie Philippe Groscaux

Le «trou noir» qualifie en astrophysique un corps dont le champ gravitationnel retient tous les types de matière et de rayonnement. Il est indiscernable et possède la propriété de happer ce qui l’entoure.
Trou noir est une boule de plastiline noire, suspendue par une chaîne. Des clés de différents types s’y retrouvent engluées, chacune correspondant à un oubli ou une disparition. De la taille d’une tête, Trou noir figure les amnésies, les pertes de mémoire et de tous les lieux qui ne sont plus accessibles, qui ont été oubliés et qui ne constituent désormais que des architectures mentales, des fantômes d’espaces.
 
Disparaître ici 2012
Carton plume, bois, matelas, tissu de protection anti-ondes électromagnétiques hautes et basses fréquences, 80 × 220 × 120 cm
Photographie Blaise Adilon

Disparaître ici est une prolongation de Dreamland : une maquette de cette architecture-paysage vient déborder de son socle et se répandre sur le sol. Elle fait alors office de carapace sous laquelle le visiteur peut venir s’isoler et se protéger de toutes les ondes électromagnétiques.
 
Kilda 2012
Bois, flocage, 375 × 675 × 450 cm
Système constructif Patrick Vindimian
Photographies Blaise Adilon
 

Paroles martiennes 2012
Stéréolithographie, dimensions variables, son
Avec le soutien du Laboratoire Parole et Langage (CNRS & AMU)
Responsable scientifique Thierry Legou
Photographies Blaise Adilon

Traduction en paroles «solides» de discours d’Hélène Smith prononcés en langue martienne*. Cette translittération est possible à l’aide de capteurs et d’un logiciel permettant la retranscription en trois dimensions de ces paroles. Dessins abstraits déployés dans l’espace, ces formes ectoplasmiques, ces «paroles gelées», sont le fruit d’une technologie de pointe qui permet de comprendre les mécanismes de la parole. Elles nous renvoient de façon amplifiée à l’énigme du langage, matérialisant la parole de l’alien qui est en nous et occupe notre grotte buccale.

 
Salle de consultation 2012
Impression sur miroir sans tain, 175 × 136 cm
Collection FRAC Aquitaine
Photographie Blaise Adilon

L’image imprimée sur le miroir sans tain provient du recadrage d’une photographie du cabinet de Sigmund Freud. Conservée au Freud Museum, et restituée ici à travers le détail de la fenêtre, cette photographie a été prise en 1938 par Edmund Engelman, quelques jours seulement avant le départ de Freud pour l’Angleterre. L’étrange dispositif optique mis en place par le psychanalyste en accrochant un miroir à sa fenêtre est «amplifié» par l’impression de cette image sur un miroir. Sans matérialité, imprimée au dos du miroir, Salle de consultation devient une image spectrale. Le miroir renvoie à ce qui n’est pas visible et le visiteur se retrouve à la fois dedans et dehors. Cette image-espace joue ainsi sur différents niveaux de réflexion et génère des espaces cachés, induisant un principe d’autoconsultation.
 
Architecture fantôme 2013
Cire, bois, plastique, 70 × 70 × 40 cm
Collection privée
Photographie Philippe Groscaux

Réalisé en cire, un voile vient recouvrir l’intégralité d’un bâtiment indéterminé.
 
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