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- Ses Parents
De 1990 1996, Gilbert Caty fut en Amazonie. Il y travailla et aussi n’y fit rien. De nombreuses personnes ne font rien en Amazonie. Pas forcément par choix, surtout parce qu’il n’y a rien à faire et que l’atmosphère y participe.
Les hamacs de l’exposition invitent à une relaxation durant laquelle il sera loisible de mâcher du chewing-gum, par exemple.
Mais Saudade Do Futuro* n’est pas tant une proposition atmosphérique q’une réflexion sur la peinture et sur les avant-gardes. Le travail de Gilbert Caty est depuis toujours une interrogation sur de nombreuses choses, parmi lesquelles les conditions de sa propre validité, et son insertion dans une continuité historique. Il soumet toute son oeuvre à une seule et même contrainte, à la fois tragique et dérisoire, qui consiste en l’inscription de toute image sur une toujours identique surface carrée de 50x50 cm. Sachant que cette règle peut être et est transgressée, parfois ou souvent. C’est l’artiste qui décide.
Ainsi, les hamacs ne sont pas rouge jaune bleu pour des raisons d’agrément, mais d’éthique. Ainsi, telle image d’Indien bandant son arc n’est justifiée que par le fait que son pagne (calembé) dessine au mur une surface rouge monochrome de 50 cm x 50 cm. L’Indien s’inscrit dans le projet. L’Indien pourrait être un Eskimo, ou un Lyonnais. Le hamac pourrait être sous les fesses de Barnett newman.
Ainsi, la Saudade Do Futuro, c’est celle de l’art moderne, de Rodtchenko particulièrement. C’est la nostalgie d’un futur que promirent les avant-gardes historiques et qui ne vint jamais, c’est la nostalgie d’un projet social dans quoi la peinture avait une place. C’est peut-être comme une dette ou un regret, mais en tout cas pas comme un deuil.
Quand les Indiens ont la Saudade, au lieu d’être tristes et de se moucher bruyamment, ils boivent et font la fête jusqu’à ce que quelque chose arrive. Souvent, rien n’arrive. Alors ils continuent.

Maxime Matray


* note de G. CATY: prononcer: saoudadji dou foutouro, la saudade étant une sorte de nostalgie positive.


Voir des vues de l'exposition Saudade do futuro à la Villa Arson, 1998