Antje POPPINGA 

Jeu, langage, expression physique dans le temps et l'espace ... etc ... à suivre

1994. Je veux construire un système artificiel (hermétique par définition) basé sur des données réelles. Pour réaliser ce système, je veux un langage qui joue avec le réel, qui n'a pas d'utilité réelle, qui se sert du réel, mais qui peut l'ignorer. En même temps, il est vrai que chaque système court le danger de se répéter à l'infini ; voir Duchamp qui a conditionné le système de l'art contemporain, et qui se voit éternellement répété. Et la répétition à l'infini est condamnée à devenir soit un acte gratuit, soit un acte (ou un geste) qui mène à la folie. Dans la publicité, les objets sont également répétés à l'infini. L'objet -même n'existe qu'un court moment, suffisant pour inciter le désir.

Au début j'ai voulu créer un système personnel qui enrobe l'univers entier au travers de mon regard. Non, tout au début, j'ai voulu faire des images. Je voyais des images, ou même pas des images mais des lignes et des formes, et puis j'ai compris qu'il faut mettre l'image dans un contexte. Une vision qui me faisait rêver. Je ne voulais plus faire que l'image mais aussi le contexte dans lequel l'image existe. Et tel un enfant, j'aurais voulu réinventer tout. J'aurais voulu avoir inventé l'ordinateur. Tous ces codes et ces chiffres qui nous renvoient au concret tout en passant par un langage abstrait me semblent être un immense champ de jeu. Et j'aimerais inventer et le vocabulaire et le contenu d'un tel système, ce qui s'avère être un projet d'une certaine envergure.

1996. Et je me rappelle ma fascination pour les livres de cuisine qui vous reconstitues le goût et le désir à travers l'image et la lecture de quelques mots. J'aimerais savoir jusqu'où l'image est comestible. J'ai trouvé des analogies entre un tel système hermétique qui est dominé par la combinaison des codes et des chiffres et l'univers du genre " nature morte " avec lequel je joue actuellement.

Dans la nature morte, le vocabulaire est comestible, donc proche d'une expression physique dans le temps, ce qui me permet de retrouver l'image à une échelle humaine, voire artisanale.

1998. Je suis entrée aux beaux-arts avec l'envie de peindre. Je suis sortie des beaux-arts avec l'envie de tout faire. Cette envie de peindre / de donner forme, de trouver "forme" pour une pensée, cette envie m'a fait explorer tout sortes de techniques d'expressions. Cependant il reste toujours la question sous-jacente : l'art, c'est quoi?
Pour faire, il faut savoir regarder / et savoir juger ce qu'on voit. Les petites choses mortes et vivantes m'ont toujours fascinée.

2000. Voyage: Se déplacer, se décaler, voir comment mon art vit loin du quotidien. Voyage / exposition éphémère .... Éphémère, parce que lointain....?

2004. J'ai parlé des chiffres, des natures mortes, des techniques diverses et des voyages, tout cela semble être des choses bien différentes. Parlant chiffres, parlant choses concrètes : parlant aussi des mensonges véhiculés par l'objectivité des chiffres. Parlant nature morte: l'exposé d'un nombre d'objets à interpréter. Parlant voyage: observer, collectionner un nombre certain d'impressions, d'informations, d'images, d'amies, de souvenirs, ...

Mon regard a cerné des objets à offrir; la viande, donner à manger (j'ai peint 60 morceaux de viande / 60 repas à partager). Mon regard a ciblé des objets qu'on m'a donnés (expo au Chili: collection d'objets que les habitants d'une ville auraient voulu exposer dans un musée).

2010. Le tout ne donne que des questions supplémentaires, on ne peut y répondre qu'en faisant des essais, des bouts de choses, créer des situations éphémères, vérifier l'état des choses par des interventions in situ, voués à l'oubli peut-être, et se battre pour une écriture autrement solide dans l'expression et le temps? De la répétition à la recomposition en continu.

Antje Poppinga 2013







Techniques et matériaux


Peinture
Dessin
Installation
Photo/vidéo
Mots Index


nature morte
rouge
écriture
aliment
ligne
champs de références


Fluxus, renaissance italienne, Marcel Duchamp, Joseph Beuys, Gerhardt Richter, Hanna Darboveen, Paul Cézanne, Marcel Broodhaers, René Magritte, pour la pipe
repères artistiques


Georges Pérec, Samuel Beckett, un peu de Gertrud Stein, Bach, Diderot