Léna DURR 

Travesti, Toulon 2016
Tirage numérique encadré, 39 x 39 cm

Travesti avec un portrait d’Amanda Lepore, Toulon 2016
Tirage numérique encadré, 39 x 39 cm

 
Femmes au bain 2015
Tirage numérique contrecollé sur PVC encadré, 150 x 177 cm
 
Postiche 2013
Photographie numérique contrecollée sur dibond, 86 x 120,5 cm
 
Marie Madeleine 2016
Tirage numérique contrecollé sur dibon et plexicollé, 150 x 100 cm
 
Pin-Up Grrrls 2014
Calendrier perpétuel de douze images
Couverture, punaise, 42 x 29,7 cm

Les douze images qui constituent le calendrier de Léna Durr sont minutieusement mises en scène, chaque élément du décor émanant de la vaste et étonnante collection d’objets issus de la culture populaire assemblée par l’artiste depuis des années et qui sous-tend sa pratique. Le consentement des douze jeunes filles ainsi que tous les aspects juridiques sont méticuleusement respectés. Toutes leurs tenues sont fabriquées sur mesure. Chaque image est soigneusement construite, éprouvée, maitrisée. Et pourtant l’écart entre ce que nous pouvons attendre d’un calendrier de pin-ups et ce que propose Léna Durr déstabilise. Pin-up Grrrls semble prendre à rebrousse-poil tout ce que nous pouvons attendre d’une approche émancipée du corps féminin. Mais à regarder de plus près, est-ce vraiment le cas ? Un premier indice se trouve dans le titre emprunté par l’artiste au livre homonyme de Maria Elena Buszek qui fait référence au mouvement des Riot Grrrls et qui comporte aussi un sous-titre : féminism, sexuality, popular culture.

En effet le travail artistique de Léna Durr est fait de la tension entre ces trois notions. Il s’inscrit d’abord dans les marges de la culture populaire mais aussi dans les mouvements artistiques issus de la troisième vague féministe qui ont émergé au cours des années 80 et 90. Les artistes comme Annie Sprinkle ou Cosey Fanni Tutti ont su profiter des brèches ouvertes par la deuxième vague féministe permettant aux femmes d’accéder plus librement à l’imagerie sexuelle populaire, pour célébrer la sexualité féminine. Mais très vite elles se sont retrouvées sous le feu croisé de la critique non seulement du moral majority des chrétiens de droite mais aussi des féministes de gauche comme l’échange par images interposées entre Annie Sprinkle, avec Anantomy of a Pin-Up photo, et Andrea Dworkin, avec Beauty Hurts, en témoigne. Cette lutte classique entre la liberté de disposer non seulement de son corps, mais aussi de l’image de son corps est bien plus ancienne que le mouvement du New Burlesque, les collectifs tels que le Carnival Knowledge Collective ou les artistes post-porn, néanmoins ce sont eux qui l’ont remis sur le devant de la scène.

Mais qu’on n’aille pas croire qu’il n’est ici question que du droit de la femme à disposer de son corps et de son image. Pin-Up Grrrls est fait des images de douze jeunes filles présexuelles. Douze jeunes filles qui jouent à une liberté pas tout à fait acquise faute d’un corps « en âge » et c’est ici que se noue le questionnement de l’artiste. Il s’agit d’établir une tension, dialectique entre normativité et liberté, entre le libre arbitre de l’individu et les attentes de la société, entre revendication et spectacle. Cette tension, heureusement irrésolue, ne cessera de nous interroger, signe évident d’une œuvre réussie.

Ian Simms février 2014
 
Vues de l’exposition, Esterel C34, La Station, Nice, 2015
 
Vues de l’exposition, Locomotion, Centre Culturel, Saint Raphael, 2016
 
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